mercredi 15 août 2012

Le vendeur professionnel qui accepte de corriger un vice interrompt la prescription

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

L'article 2898 C.c.Q. prévoit que la reconnaissance d'un droit interrompt la prescription. Cette reconnaissance est habituellement assez simple à reconnaître lorsqu'il s'agit d'une dette monétaire (quoique que nous avons déjà traité de situations qui n'étaient pas particulièrement évidentes), mais la tâche est plus complexe lorsqu'il s'agit d'un autre type d'obligation. C'est pourquoi nous attirons aujourd'hui votre attention sur l'affaire Givre Climatisation inc. c. Pelletier (2012 QCCA 1416) où l'Honorable juge Jacques Dufresne confirme que le vendeur professionnel qui accepte de corriger un vice interrompt la prescription.


Dans cette affaire, la Requérante demande la permission de se pourvoir contre un jugement qui l'a condamné à payer aux Intimés 25 459,75 $ pour la réfection du système de chauffage et 5 000 $ à titre de dommages pour troubles, inconvénients et perte de jouissance de la vie.

Une des questions névralgiques qui se pose dans cette affaire est celle de la prescription. Le juge de première instance (l'Honorable juge Denis Le Reste) en était venu à la conclusion que le fait pour la Requérante, vendeur professionnel, de corriger (ou tenter de corriger) les vices qui affectaient le bien a eu pour effet d'interrompre la prescription.

Le juge Dufresne est d'opinion que la permission d'en appeler doit être refusée en l'instance. À cet égard, il confirme le raisonnement du juge de première instance sur la question de la prescription:
[5] Le juge estime qu'il y a eu interruption de la prescription en faveur des intimés par les agissements des représentants de la requérante, d'autant que la garantie de dix ans pièces et main d'œuvre de toutes les composantes de la thermopompe n'expirait qu'en juillet 2009. Il écarte l'argument de la prescription en ces termes :
[93] Le Tribunal estime qu'il est évident que lorsque la défenderesse, à titre de vendeur professionnel, accepte durant plusieurs années de corriger un vice qu'elle reconnaît, elle agit de façon à interrompre la prescription. 
[94] Quoi qu'il en soit, compte tenu de l'interruption de la prescription, compte tenu du fait que le point de départ de la prescription pour le Tribunal débute à compter de février 2009, date où on a véritablement avisé les demandeurs qu'il était impossible de réparer la totalité de la thermopompe, le Tribunal estime que la procédure introductive d'instance du 1er juin 2010 n'est pas prescrite.
[6] Le juge s’appuie sur l'article 2898 C.c.Q.,qu'il cite au paragraphe [81] du jugement. Cette conclusion est bien fondée et trouve appui dans l’arrêt de notre Cour dans Gosselin c. Centre de camping Rémillard inc.:
[12] Il est évident qu’un vendeur professionnel qui accepte durant plus que trois ans de corriger un vice reconnaît son obligation de le faire et par ce fait, reconnaît sa dette. Cette reconnaissance a l’effet d’interrompre la prescription.
[7] Par ailleurs, le juge estime que les intimés ont droit à l'annulation du contrat et au remboursement du prix de vente, vu « l'absence totale de fonctionnement du bien ». Il ajoute :
[121] Le Tribunal estime qu'il s'agit ici d'un cas très évident et patent d'une compagnie qui a fait valoir des promesses d'économies, de confort et de santé à des consommateurs et en leur promettant une sécurité d'esprit dans le cadre d'une garantie de dix ans sans honorer de quelque façon que ce soit cette dernière. 
[…] 
[123] Le Tribunal estime qu'il y a preuve très hautement prépondérante justifiant le bien-fondé de la réclamation quant à l'annulation de la vente.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/MywP2y

Référence neutre: [2012] ABD 283

Autre décision citée dans le présent billet:

1. Gosselin c. Centre de camping Rémillard inc., J.E. 2001-888 (C.A.).

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