Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
J'attire ce matin votre attention sur une décision très intéressante de la Cour d'appel en matière de preuve dans Furs by Leonard Gorski Inc. c. Global Furs Inc. (2012 QCCA 1043). Dans celle-ci, la Cour indique que les chèques et les factures ne sont pas des écrits instrumentaires, ce qui implique que (a) la règle de l'article 2863 C.c.Q. ne s'applique pas à eux et (b) on peut en contredire le contenu par tous les moyens.
Dans cette affaire, l’Appelante se
pourvoit contre un jugement de la Cour supérieure rendu le 21 septembre 2010.
Ce jugement accueillait l’action des Intimées condamnait l’Appelante à leur
verser respectivement des sommes de 420 029,87 $ et de 251 606,20 $, et rejetait
la demande reconventionnelle de l’Appelante. Par son pourvoi, l’Appelante conclut derechef au rejet de l’action des
Intimées et elle demande que soit accueillie à hauteur de 1 221 187,48 $ la
demande reconventionnelle dont elle fut déboutée en première instance.
L'Appelante basait sa preuve en partie sur des chèques et des factures qui portaient des mentions qui semblaient supporter sa cause. Elle s'objectait également à toute preuve testimoniale contraire à ces mentions en l'absence de commencement de preuve, citant l'article 2863 C.c.Q.
La Cour d'appel confirme la décision du juge de première instance de rejeter ces objections. En effet, elle en vient à la conclusion qu'il ne s'agit pas d'écrits instrumentaires au sens de l'article 2831 C.c.Q.:
Or, les mentions qui apparaissent sur les delivery slips de l’appelante ne peuvent suffire, à elles seules, à vider la question sur laquelle s’opposent les parties : celle de la destination du 5 % prélevé par l’appelante.
[38] Si l’on admet, comme l’appelante elle-même le fait valoir, que « the cheques and the invoices contain a neutral mention of “less 5%, less 4%”, which does not tend to make Gorski alleged obligation to remit the 5% discount to Neiman Marcus more probable » [soulignements ajoutés], les témoignages cités par le juge ne contredisent pas ces écrits.
[39] Et d’ailleurs, ces derniers ne constituent pas des écrits instrumentaires, même au sens de l’article 2831 C.c.Q. Cet article prévoit que :
2831. L'écrit non signé, habituellement utilisé dans le cours des activités d'une entreprise pour constater un acte juridique, fait preuve de son contenu.
Mais une facture n’est pas, en principe, un écrit instrumentaire; elle relate un fait affirmé par la personne de qui elle provient. Et, même si l’on devait supposer qu’elle peut, en certaines circonstances, constituer un écrit visé par l’article 2831 C.c.Q., il demeure qu’un tel écrit, dans un cas comme celui-ci, serait aussi assujetti à l’article suivant :
2836. Les écrits visés par la présente section peuvent être contredits par tous moyens.
[40] L’article 2863 est donc sans application en l’occurrence. Et comme il ne peut faire de doute que l’on est ici en présence d’actes juridiques, là où il y en a eu, qui furent passés, d’ailleurs oralement, dans le cours des activités d’une ou de plusieurs entreprises, la preuve testimoniale en question était recevable. Il revenait au juge de l’apprécier et c’est ce qu’il a fait. En l’absence d’une erreur manifeste et déterminante, on doit accepter ses conclusions, partiellement fondées ici sur la crédibilité des témoins qu’il a entendus.
[41] Or, cette preuve testimoniale, ainsi que les courriers électroniques échangés entre les parties en juillet 2005, rendent les allégations des intimées non seulement plausibles mais plus vraisemblables que celles de l’appelante. Du moins ne peut-on reprocher au juge de première instance d’avoir commis dans l’appréciation de ces éléments de preuve une erreur réformable en appel.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/JXgkqR[42] Ce second moyen de l’appelante est sans mérite.
Référence neutre: [2012] ABD 189
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