lundi 29 août 2011

Prescription acquisitive: la possession peut être personnelle ou exercée à travers un intermédiaire

par Karim Renno

En matière de prescription acquisitive, le débat est souvent centré sur la question de la possession. Or, dans l'affaire Madou c. Cayer (2011 QCCS 4274), l'Honorable juge Suzanne Tessier nous rappelle que le possesseur n'a pas nécessairement à agir personnellement et qu'il lui est possible de continuer cette possession à travers un intermédiaire.


Les Demandeurs veulent se faire reconnaître un droit de propriété sur deux parcelles de terrain par prescription acquisitive. La juge Tessier doit déterminer s'ils ont eu une possession continue pendant la période requise pour faire l'acquisition des parcelles par voie de prescription.

À cet égard, elle fait une étude admirable des autorités traitant de la possession par voie d'un intermédiaire:
[113] La prescription acquisitive d’un immeuble.  
[114] De l’avis du Tribunal que l’on retienne le délai de 10 ou de 30 ans pour valoir prescription, il y a eu preuve de possession utile à la prescription depuis que les parents de Benoît St-Louis en sont propriétaires en 1962 sans interruption jusqu’en décembre 2004 pendant une période de 42 ans et sans que leur possession soit remise en cause valablement. 
[115] Pierre-Claude Lafond écrit de la présomption de l’article 925 du C.c.Q. sur la possession :
« La preuve de la continuité est facilitée grâce à la présomption de l'article 925, al. 1 C.c.Q. Cette disposition énonce que le possesseur actuel est présumé avoir une possession continue depuis le jour de son entrée en possession. Celui qui prouve aujourd'hui sa possession et le fait d'avoir possédé à une époque antérieure est donc présumé avoir possédé depuis ce temps. Relative, cette présomption peut être repoussée; celui qui invoque le vice de discontinuité doit le prouver. »
[116] Il y a lieu de préciser que selon l’article 921 C.c.Q. la possession est l’exercice de fait par soi-même ou par l’intermédiaire d’une autre personne qui détient le bien. Le juge Babin dans Gravel c. Phenix reprenant les propos du juge Bernard Flynn dans Primeau c. Cardinal écrit sur la possibilité de prescrire par les gestes posés par un locataire.
«L'intimé a soulevé que l'auteur du requérant (le père) ne pouvait pas prescrire à l'époque où il n'était que locataire. Or, il faut bien noter que la possession qu'invoque le requérant n'est pas celle du propriétaire du terrain d'alors (le locateur), dont, entre autres choses, la remise empiétait chez le voisin. Par ailleurs, on pourrait probablement considérer que le propriétaire qui loue à quelqu'un un terrain qui empiète chez le voisin et qui en reçoit le loyer a par son locataire une possession utile
[117] La Cour d’appel dans l’affaire Dessureault c. Brien devait décider si un immeuble servant de ferme et cultivé par l’auteur de l’appelant cesse de cultiver lui-même et autorise un autre individu à cultivé la parcelle en litige pouvait prescrire. Elle conclut que l’autorisation accordée ne pouvait être donnée que par celui qui était propriétaire ou à tout le moins, se croyait propriétaire. 
[118] La prescription acquisitive d’un immeuble nécessite une possession utile, paisible continue, publique et non équivoque. La possession en vertu de l’article 2193 ne doit souffrir aucune équivoque, ou incertitude ou contestation.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/n1cvkK

Référence neutre: [2011] ABD 282

Autres décisions citées dans le présent billet:

1. Gravel c. Phenix, (2009) AZ-50567066 (C.S.).
2. Dessureault c. Brien, J.E. 2003-1152 (C.A.).

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