jeudi 5 mai 2011

Une durée de trois ans pour une clause de non-concurrence prévue dans un contrat d’emploi est excessive

Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

En matière de clause de non-concurrence, l’article 2089 C.c.Q. prévoit que la clause doit être limitée dans le temps à ce qui est nécessaire pour protéger les intérêts légitimes de l’employeur. Dans l’affaire Lapointe (Lapointe de l’ongle) c. Allard (2011 QCCQ 54), l’Honorable juge Pierre Coderre discute de ladite limite.


Dans cette affaire, la Demanderesse réclame la somme de 7 000$ de la Défenderesse au motif qu’elle n’aurait pas respecté les clauses de non-concurrence et non-sollicitation prévues à son contrat d’emploi. Dans ce cadre, le juge Coderre est appelé à se prononcer sur la validité de la clause de non-concurrence eu égard à sa durée stipulée de trois (3) ans.

Le juge Coderre souligne d’abord que les tribunaux et les auteurs ont accepté une durée aussi longue que deux (2) ans :
[20] En premier lieu, la défenderesse affirme que le contrat de non-concurrence serait nul. Dans Roulottes A & S Lévesque (1993) Inc. c. Lévesque, la juge Christiane Alary, de la Cour supérieure, a été appelée à analyser un contrat comportant à la fois des clauses de non-concurrence et de non-sollicitation. Elle écrit :
[29] Le Contrat comporte à la fois une clause de non-concurrence et des clauses de non-sollicitation. La doctrine qualifie parfois ces dispositions de « clauses restrictives ».
[…]
[32] En matière de contrat individuel de travail, une clause restrictive sera généralement jugée valide si elle est d’une durée maximum de deux ans.
[21] Dans son texte intitulé « Les conditions de validité des clauses de non-concurrence dans les contrats d’emploi : synthèse », Me Nathalie-Anne Béliveau écrit à ce sujet :
De façon générale, les tribunaux reconnaissent la validité de clauses de non-concurrence pouvant aller jusqu’à 24 mois. Selon la professeur et juge Bich :
Sur la question de la durée, la lecture de la jurisprudence montre qu’habituellement, les clauses d’une durée de 12 mois sont jugées acceptables (si les activités prohibées et la portée territoriale sont raisonnables); il n’est pas rare non plus que les clauses de 12 à 24 mois soient jugées valides, mais elles sont néanmoins plus suspectes que celles de 12 mois et moins et exigent par conséquent un examen plus poussé. Au-delà de 24 mois, la tendance se renverse […]. Il s’agit toutefois souvent dans ces cas d’une clause de non-concurrence accompagnant un contrat de travail lui-même accessoire à un contrat de vente d’actions ou d’entreprise ayant donné lieu à une compensation importante du salarié.
Une durée de 24 mois s’inscrit donc, selon la jurisprudence actuelle, comme une durée maximale quasi absolue.
À la lumière de ces enseignements, le juge Coderre en vient à la conclusion qu’une durée de trois (3) ans pour une clause de non-concurrence est excessive.

Le texte intégral du jugement est disponible ici : http://bit.ly/mEmfnU

Référence neutre : [2011] ABD 151

Autre décision citée dans le présent billet :

1. Roulottes A & S Lévesque (1993) Inc. c. Lévesque, J.E. 2008-1883 (C.S.).

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