vendredi 13 mai 2011

L'usufruitier peut consentir une hypothèque affectant ses droits sur une propriété, mais le créancier ne peut exercer ces droits en affectuant une prise en paiement

Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

La personne titulaire d'un démembrement du droit de propriété peut-elle consentir des droits hypothécaires? Dans l'affirmative, sur quoi peut-elle le faire et quels sont les droits qui peuvent être exercés par le créancier? Ce sont là les questions très intéressantes dont traite l'affaire Borduas (Estate of) c. Denis (2011 QCCS 2118).


La trame factuelle est quelque peu complexe.

Pour nos fins, il suffit de retenir que, dans son testament, M. Denis Lépine laisse les droits d'usufruit sur sa résidence à sa femme, la Défenderesse, tant qu'elle est vivante et le droit de propriété sur cette résidence à sa fille de 14 ans. Suivant le décès de M. Lépine, sa mère prête la somme de 61 350$ à la Défenderesse, en considération de quoi une hypothèque lui est consentie par la Défenderesse pour la pleine valeur du prêt. Cette hypothèque n'est pas signée par la propriétaire de la résidence. Le solde du prêt n'est pas payé, de sorte que la créancier hypothécaire cherche maintenant à exercer ses droits hypothécaires par voie de prise en paiement.

L'Honorable juge Mark Peacock est chargé de trancher le litige. Il note d'abord que l'article 1119 C.c.Q. confirme que l'usufruit est un démembrement du droit de propriété et un droit réel. Ainsi, il est possible selon le juge Peacock d'hypothéquer ce droit:
[42] That said, it is possible where dismembered rights are involved, such as emphyteusis, to contractually agree that the hypothecary creditor may take in possession these rights, which would include all the rights and obligations under an emphyteutic lease.
[43] Having determined that the new hypothec is valid and having determined exactly what right is hypothecated, the question now becomes whether the Plaintiff can exercise the remedy it requests. For the reasons that follow, the Court determines it cannot.
Cependant, note le juge Peacock, cela ne veut pas dire que le créancier hypothécaire peut prendre la propriété en paiement. En effet, l'usufruitier ne peut consentir plus de droits qu'il ne possède et à défaut d'une hypothèque consentie par la propriétaire, la prise en paiement n'est pas possible:
[44] In the seventh conclusion of its Introductory Motion, the Plaintiff asks the Court to declare amongst others, that it takes the property in payment and becomes the sole owner retroactively to the inscription of the prior notice of September 17, 2008.
[45] In reality, the Plaintiff is seeking the full benefit of art. 2781 C.C.Q. and following, as if it had the right to take in payment where a standard hypothec was given by the owner of a property.
[46] However, as we have just seen, this is not the case.

Le juge Peacock refuse donc la prise en paiement, laissant ouverte la possibilité pour le créancier hypothécaire d'exercer un autre des recours hypothécaires prévus au Code civil.

Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/mbDfth

Référence neutre: [2011] ABD 164

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