jeudi 24 mars 2011

Défaut pour une partie de respecter le délai de 180 jours: l'erreur de l'avocat est équivalente à une impossibilité d'agir

Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

L'introduction de la limite du 180 jours dans la procédure civile impose aux parties une importante responsabilité. Ceci étant dit, les tribunaux ont maintes fois indiqué qu'une partie ne devrait jamais souffrir de l'erreur de ses procureurs. L'affaire St-Élien c. Lévesque (2011 QCCQ 1899) offre une belle illustration de cette réalité.


Le Défendeur, par ses avocats, présente une inscription (datée du 8 décembre 2010) pour jugement recherchant la condamnation des demanderesses aux frais et honoraires judiciaires, puisque les demanderesses n'ont pas ou ont négligé d'inscrire leur action dans les délais permis, devenant donc réputées s'être désistées de leur demande. Les Demanderesses, par leur avocate, répliquent par une requête (datée du 15 décembre 2010), demandant d'être relevées du défaut d'inscrire dans les délais légaux et, en conséquence, l'annulation de l'inscription du Défendeur. L'avocate des Demanderesses fait valoir que c'est de sa faute si l'inscription n'a pas été produite à temps.

L'Honorable juge André Renaud rappelle qu'une partie ne devrait pas être préjudicié en raison d'une erreur de son procureur:
[14] Il est déjà arrivé qu'une telle situation se présente devant les tribunaux.
[15] Ainsi, dans un jugement de monsieur le juge De Pokomandy dans l'affaire Stever c. le Sous-ministre du revenu du Québec, celui-ci écrit ceci:
«[26] Nous sommes entièrement d'accord avec la nécessité d'une politique de fermeté en matière de procédures pour favoriser l'expédition efficace des affaires soumises aux tribunaux. Cela ne peut toutefois pas pour autant se traduire par le refus systématique de permettre la remise en état de dossiers apparemment sérieux pour le motif que l'avocat, par erreur ou par négligence, a omis de poser un geste requis. Le rejet d'une telle procédure pour ce motif pourrait bien entraîner une injustice irréparable.
[39] Non seulement le représentant du sous-ministre du Revenu qui, on peut le présumer, connaissait la loi en cause et la procédure à suivre, n'a pas communiqué avec la partie requérante pour négocier l'échéancier…»
[16] Et monsieur le juge a effectivement relevé les requérants de leur défaut d'inscrire.
[17] Dans une autre affaire Ricard c. Z.E.C. Bessonne, monsieur le juge Benoit Moulin écrit ceci:
«[32] Le Tribunal est d'avis que la situation dans laquelle se trouve le demandeur est le résultat d'erreurs, d'omissions et d'informations inexactes dont il n'est pas l'auteur, dont il n'est pas responsable, dont il ne devrait pas subir les conséquences et dont la défenderesse ne devrait pas tirer profit sans quoi, l'article 2 du Code de procédure civile risquerait de perdre son sens.
[38] Bref, il démontre avoir été dans l'impossibilité en fait d'agir plus tôt que le moment où il a procédé au dépôt après signification d'une inscription pour enquête et audition ex parte en mai 2009.
[39] Par ailleurs, la défenderesse n'invoque et ne démontre aucun préjudice reconnu par la jurisprudence. Relever le demandeur de son défaut ne lui occasionne aucune conséquence irréparable. Toutefois, vu les circonstances du présent litige, il n'y a pas lieu de lui en faire supporter les frais.»
et il relève le demandeur de son défaut d'inscrire.
Pour cette raison, le juge Renaud en vient à la conclusion que les Demanderesses doivent être relevées de leur défaut.

Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/eJypYR

Référence neutre: [2011] ABD 99

Autres décisions citées dans le présent billet:

1. Stever c. le Sous-ministre du revenu du Québec, J.E. 2007-494 (C.Q.). Confirmé par J.E. 2007-493 (C.A.).
2. Ricard c. Z.E.C. Bessonne, J.E. 2009-1446 (C.S.).

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