lundi 15 novembre 2010

Une clause d’entente complète n’empêche pas une partie au contrat de faire la preuve de fausses représentations ou de dol précontractuels

par Karim Renno
Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

Le 21 septembre dernier, nous attirions votre attention sur un jugement de la Cour d’appel qui, tout en reconnaissant l’efficacité des clauses d’entente complète, indiquait que celles-ci n’excluaient pas la possibilité de présenter une preuve testimoniale en cas d’ambiguïté. Dans la même veine, nous traitons aujourd’hui d’un jugement récent de la Cour supérieure, Station Mont Tremblant, s.e.c. c. Gestion Les Légendes inc. (2010 QCCS 5419) qui dispose de la question de savoir si de telles clauses empêchent une partie au contrat de prouver de fausses représentations ou du dol précontractuels.


Dans cette affaire, la Défenderesse demande le rejet de la requête en délaissement forcé de la Demanderesse et l'annulation du contrat de vente sous-jacent au motif qu'elle a été victime de fausses représentations et de dol. La Demanderesse, invoquant l’existence de la clause d’entente complète dans le contrat de vente, demande le rejet de la défense et demande reconventionnelle de la Défenderesse au motif qu’elle ne peut soulever des représentations ou négociations avant la signature de la Convention. Elle allègue également que la Défenderesse n'a pas allégué qu'elle n'a pas consenti à la clause d'intégralité et donc, elle ne peut soulever les représentations avant la signature.

L’Honorable Eva Petras rejette la requête en irrecevabilité de la Demanderesse. Elle indique que la jurisprudence québécoise permet l’allégation de fausses représentations ou de dol même en présence d’une clause d’entente complète et qu’il est donc trop tôt pour trancher définitivement la question:

[39] La jurisprudence québécoise dans le domaine des clauses d'intégralité contenues dans les contrats confirme que la clause d'intégralité a plein effet en l'absence de fraude ou de dol : fraus omnia corrumpit.

[40] Pour cette raison, la preuve visant à établir la nullité d'un acte juridique pour cause de dol devrait être admissible même si elle a pour effet de contredire le contrat.

[41] Cette jurisprudence abondante établit qu'il est clair qu'une victime de fausses représentations ou de dol ne peut renoncer à l'avance aux sanctions de l'article 1407 C.c.Q. par une clause expresse. La victime de fraude ou de dol doit être libre d'attaquer la vente au motif de l'erreur provoquée par le dol.

[42] Le Tribunal ne saurait mettre fin prématurément au litige alors que c'est le juge qui entendra le mérite de la cause qui devra trancher toute la question de la validité ainsi que l'application de la clause d'intégralité.

[43] Le Tribunal laissera au juge, qui sera saisi du mérite de la cause, le soin d'analyser si les circonstances dans lesquelles les conventions ont été conclues doivent être considérées et si les discussions et représentations précontractuelles peuvent être reçues en preuve.

[44] Considérant les fausses représentations et le dol allégués dans la défense et demande reconventionnelle, il appartiendra au juge qui présidera le procès de décider si la clause d'intégralité doit faire obstacle à la présentation de ladite preuve.
Référence : [2010] ABD 157

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