mardi 16 novembre 2010

Le fait pour une personne analphabète de ne pas poser de questions avant de signer un document constitue une erreur inexcusable

Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

Les analphabètes souffrent de plusieurs désavantages fonctionnels. Un des plus importants est le fait qu’ils ne peuvent prendre eux-mêmes connaissance des contrats qu’ils sont appelés à signer. Par ailleurs, comme l’indique le jugement récent de la Cour supérieure dans Services d'habitation Poitras c. Normand (2010 QCCS 5426) il ne s’en suit pas nécessairement que les contrats qu’ils signent sont frappés d’un vice de consentement.


Dans cette affaire, les Défendeurs, dont un est analphabète, signent une promesse bilatérale d’achat. Cette promesse n’ayant jamais menée à une vente, la Demanderesse intente une action en passation de titre. Les Défendeurs s’y opposent pour plusieurs raisons, incluant le vice de consentement du Défendeur qui allègue avoir compris que le prix de vente serait de 160 000$ alors qu’il est stipulé à 120 000$ dans la promesse.

Pour d’autres motifs, l’Honorable juge Jean-Pierre Plouffe rejette l’action de la Demanderesse. Par ailleurs, sur la question du vice de consentement, il aurait rejeté l’argument du Défendeur au motif qu’il a commis une erreur inexcusable. En effet, le Défendeur admet pouvoir lire les chiffres et le juge Plouffe est d’opinion que la vue du 120 000$ dans la promesse aurait du amener le Défendeur à poser des questions :
[71] Dans leur défense et demande reconventionnelle amendée, les intimés allèguent que le consentement de M. Paul Aubé a été vicié par l’erreur, vu qu’il est illettré. Cette erreur aurait été provoquée par le dol de la co-intimée Julie Normand, quant au prix d’achat.
[72] Tel que le stipule l’article 1400 C.c.Q. in fine, l’erreur inexcusable ne constitue pas un vice de consentement.

[73] En l’espèce, même si le co-intimé déclare être illettré, il a reconnu être capable de lire les chiffres. Il s’ensuit qu’au moment de signer la promesse d’achat P-1, il pouvait lire le chiffre «120 000 $» apparaissant à la clause 9(b) de la promesse. Ce qui précède aurait dû l’inciter à poser des questions ou à demander qu’on lui lise cette clause.

[74] Comme il n’a pas pris ces précautions, le Tribunal estime, compte tenu des circonstances particulières de l’espèce, que si erreur il y a, elle est inexcusable et ne constitue pas un vice de consentement.
Référence : [2010] ABD 160

Aucun commentaire:

Publier un commentaire

Notre équipe vous encourage fortement à partager avec nous et nos lecteurs vos commentaires et impressions afin d'alimenter les discussions à propos de nos billets. Cependant, afin d'éviter les abus et les dérapages, veuillez noter que tout commentaire devra être approuvé par un modérateur avant d'être publié et que nous conservons l'entière discrétion de ne pas publier tout commentaire jugé inapproprié.