par Karim Renno
Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.
La décision de la Cour suprême dans l'affaire Dunsmuir avait sûrement comme objectif de simplifier les questions relatives à l'application de la norme de contrôle des décisions des tribunaux administratifs. Malheureusement, et nonobstant la réduction du nombre de normes applicables de 3 à 2, l'identification de la norme applicable demeure une question difficile et controversée. Dans la très récente décision de la Cour d'appel dans Bourgoin c. Fédération des producteurs acéricoles du Québec (2010 QCCA 1593), celle-ci rappelle que la norme applicable aux questions de compétence d'un tribunal administratif est celle de la décision correcte.
Le pourvoi portait sur la question de savoir si Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec avait le pouvoir de condamner l'appelant à des dommages et intérêts pour avoir contrevenu aux conventions de mise en marché que la Régie a décrétées faute d'entente entre les parties concernées. Ces conventions comportaient en effet des clauses de dommages et intérêts liquidés. En application de ces clauses, la Régie avait condamné l'appelant à payer plus d'un million de dollars en dommages et intérêts. La Cour supérieure, siégeant en révision de cette décision, avait confirmé le jugement de la Régie et appliqué la norme de la décision raisonnable.
La décision de la Cour suprême dans l'affaire Dunsmuir avait sûrement comme objectif de simplifier les questions relatives à l'application de la norme de contrôle des décisions des tribunaux administratifs. Malheureusement, et nonobstant la réduction du nombre de normes applicables de 3 à 2, l'identification de la norme applicable demeure une question difficile et controversée. Dans la très récente décision de la Cour d'appel dans Bourgoin c. Fédération des producteurs acéricoles du Québec (2010 QCCA 1593), celle-ci rappelle que la norme applicable aux questions de compétence d'un tribunal administratif est celle de la décision correcte.
Le pourvoi portait sur la question de savoir si Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec avait le pouvoir de condamner l'appelant à des dommages et intérêts pour avoir contrevenu aux conventions de mise en marché que la Régie a décrétées faute d'entente entre les parties concernées. Ces conventions comportaient en effet des clauses de dommages et intérêts liquidés. En application de ces clauses, la Régie avait condamné l'appelant à payer plus d'un million de dollars en dommages et intérêts. La Cour supérieure, siégeant en révision de cette décision, avait confirmé le jugement de la Régie et appliqué la norme de la décision raisonnable.
L'honorable juge Jean Bouchard, écrivant pour une Cour unanime, traite de la question de la norme applicable. Ainsi, il note que même si la Régie se prononçait sur sa loi habilitante, la question centrale en était une de compétence, i.e. savoir si elle a le pouvoir de condamner une personne à des dommages et intérêts:
[37] D'entrée de jeu et à l'instar du juge de première instance, on constate que la Régie était consciente qu'elle devait se prononcer sur sa propre compétence puisqu'elle écrit, à la page 23 de sa décision :La Régie doit déterminer si elle peut décréter, dans les sentences arbitrales qui tiennent lieu de convention, des dommages liquidés et si ces dommages constituent le cas échéant, des pénalités incompatibles avec l'article 193 de la loi.[38] Ce faisant, il est vrai, la Régie était appelée à interpréter sa loi constitutive ce qui, en principe, commande retenue et déférence, et ce, d'autant plus qu'elle agissait au coeur même de son expertise spécialisée en arbitrant et décrétant des conventions de mise en marché.
[39] À y regarder de près et comme l'enseigne la Cour Suprême dans l'arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, force est de constater cependant qu'une véritable question de compétence se pose en l'espèce, car la Régie devait déterminer expressément si le législateur l'a bel et bien investie du pouvoir de décréter des dommages-intérêts liquidés dans une convention de mise en marché. Or, en ce domaine, la Régie ne peut pas se tromper, sinon elle pourrait se trouver à agir de manière ultra vires, c'est-à-dire en dehors du cadre fixé par le législateur. Aussi, je suis d'avis que c'est la norme de la décision correcte qui s'applique contrairement à la conclusion du juge de première instance qui a plutôt appliqué la norme de la décision raisonnable.
Le juge Bouchard en vient donc à la conclusion que la norme applicable en l'instance est celle de la décision correcte. Son interprétation des dispositions pertinentes de la loi l'amenant à la conclusion que la Régie n'avait pas le pouvoir d'imposer des dommages et intérêts, la Cour renverse le jugement rendu par la Régie.
Référence : [2010] ABD 86
Exactement la décision qu'il me fallait pour répondre à une question dans mon travail de droit administatif. Dunsmuir ne permettait pas de trancher dans une situation ou un tribunal administatif doit déterminer sa propre compétence tout en analysant sa loi habilitante.
RépondreEffacerNous sommes heureux de vous avoir été utiles. Bonne chance avec votre travail.
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