lundi 9 août 2010

Recours collectif: il est possible de substituer le représentant avant l'autorisation par voie d'amendement

par Karim Renno
Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

Depuis la décision rendue en 2006 par la Cour d’appel dans Bouchard c. Agropur Coopérative (2006 QCCA 1342), il est d’autant plus important de choisir judicieusement le représentant d’un groupe en matière de recours collectif. Depuis ce temps, on assiste à une augmentation importante des demandes de substitution du représentant avant l’autorisation. La décision très récente de Langevin c. Bouchard (2010 QCCS 3417) vient apporter un éclairage intéressant sur de telles demandes.


Dans cette affaire, le représentant proposé du groupe demande à la Cour d’autoriser des amendements, dont un qui aurait pour effet de lui substituer une personne morale régie par la partie III de la Loi sur les compagnies à titre de représentante. Les défendeurs contestent cette demande d’amendement pour plusieurs raisons, incluant le fait qu’on ne peut substituer un représentant par voie d’amendement et que la nouvelle représentante proposée n’aurait pas de cause d’action valide contre eux.

Chargé de trancher le débat, l’Honorable juge Paul Mayer indique d’abord que rien ne s’oppose au changement de représentant par voie d’amendement, même si la procédure traditionnelle est de procéder via l’article 1024 C.p.c. :
[22] Même si cet amendement n'entraîne pas directement la substitution du représentant par une personne morale, le Tribunal croit qu'elle le permet de façon indirecte.

[23] Dans Cloutier c. Infineon Technologies a.g., le Tribunal entend différentes demandes concernant deux requêtes en autorisation d'intenter un recours collectif dans deux dossiers différents. L'une de ces requêtes vise à substituer le représentant du groupe, une personne physique, par une personne morale, Option Consommateurs.

[24] La Cour supérieure fait droit à cette demande puisqu'elle est d'avis que l'amendement proposé rencontre les critères des articles 199 et 1016 C.p.c. Elle mentionne ceci :
Le Tribunal est d'avis que les amendements recherchés dans le dossier Cloutier ne sont pas inutiles ou contraires aux intérêts de la justice.

De plus, il n'en résulte pas des demandes entièrement nouvelles sans rapport avec les demandes originaires.

L'article 1016 C.p.c. permet la demande d'amendement en matière de recours collectif.

[…] 
En l'espèce, le Tribunal est d'avis que les critères énoncés dans le Code de procédure civile étant respectés, les demandes d'amendement doivent toutes être reçues.

Le meilleur intérêt du groupe visé requiert les amendements demandés.
[25] À la lecture de ce qui précède, le Tribunal conclut qu'une personne morale peut se substituer au représentant d'un groupe par le biais d'un amendement en autant que les conditions prévues aux articles 199 et 1016 C.p.c. soient respectées.

Par ailleurs, rappelle le juge Mayer, il faut s’assurer que l’amendement proposé est dans le meilleur intérêt du groupe. Or, en l’instance, le recours entrepris se base sur l’article 19.2 de la Loi sur la qualité de l’environnement lequel ne peut bénéficier à une personne morale. La nouvelle représentante proposée ne pouvant pas se prévaloir du recours, elle n’est pas dans l’intérêt des membres du groupe de permettre l’amendement :
[28] En l'instance, il n'est pas dans le meilleur intérêt des membres du groupe que le requérant soit remplacé par une personne morale car il est impossible pour une personne morale d'avoir recours à l'article 19.2 L.Q.E. et aux avantages de cette loi qui vise les personnes physiques seulement.
 
Référence : [2010] ABD 56

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