par Karim Renno
Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.
La Cour d'appel a rendu mercredi dernier un jugement très attendu en matière de reconnaissance des jugements étrangers dans l'affaire Notiplex Sécurité incendie inc. c. Honeywell International Inc. (2010 QCCA 1028).
Les faits de la cause sont relativement complexes, mais pour les fins du présent commentaire il suffit des les résumer brièvement comme suit: des procédures ont été instituées au Connecticut par Honeywell contre Notiplex. Cette dernière a été dûment signifiée, a déposé un acte de comparution et a produit une défense (sans contester la juridiction des tribunaux du Connecticut). Les parties semblent ensuite conclure une transaction sur l'objet de leur litige. Cette transaction est signée au Connecticut par le procureur de Notiplex. La problématique survient du fait que les dirigeants de Notiplex allèguent qu'ils n'ont pas donné l'autorisation à leur procureur de signer la transaction et refusent de s'y conformer. Honeywell demande donc au tribunal américain d'homologuer la transaction et envoi avis de cette demande à Notiplex. Cette dernière décide de ne pas se présenter lors de l'audition et la transaction est homologuée. Honeywell demande la reconnaissance de ce jugement au Québec.
En contestation, Notiplex fait valoir que Honeywell a obtenu un jugement par défaut au Connecticut et qu'elle devait donc faire la preuve de la signification en bonne et due forme de sa requête pour homologation en vertu de l'article 3156 C.c.Q. La Cour d'appel, confirmant le jugement de première instance, insiste sur la différence important entre un jugement obtenu par défaut et celui obtenu en l'absence de contestation:
Bien que Notiplex admette avoir reçu signification des procédures au Connecticut et être au courant des procédures entreprises contre elle, elle soutient que l’article 3156 C.c.Q. ne fait aucune distinction entre un jugement par défaut de comparaître et celui rendu par défaut de plaider.
Cette prétention n’est toutefois pas fondée en droit, l'article 3156 C.c.Q. ne visant que la signification de l’acte introductif d’instance.
Les commentaires du ministre de la Justice clarifient cette problématique :
Le fardeau de la preuve de la signification régulière de l’acte introductif d’instance incombe au demandeur. Le défendeur peut toutefois prouver que, dans les circonstances, il n’a pas eu connaissance de l’acte introductif d’instance ou qu’il n’a pas disposé d’un délai suffisant pour présenter sa défense.
Autre argument soulevé par Notiplex: la transaction prévoyait des obligations futures, ce qui impliquait nécessairement que le jugement au Connecticut n'était pas un jugement final au sens du C.c.Q. puisque le non respect des ces obligations eut invalidé la transaction.
Encore une fois, la Cour rejette l'argument et rappelle que la possibilité théorique qu'une supervision judiciaire soit nécessaire ne doit pas faire obstacle à la reconnaissance des jugements étrangers:
Encore une fois, la Cour rejette l'argument et rappelle que la possibilité théorique qu'une supervision judiciaire soit nécessaire ne doit pas faire obstacle à la reconnaissance des jugements étrangers:
En l'occurrence, le fait que ce jugement étranger homologue une transaction qui comprend certaines obligations futures à être exécutées par les parties, ainsi que certaines clauses de défaut, n’enlève rien au caractère final et définitif de la décision rendue par le tribunal du Connecticut.
Ce faisant, la Cour d'appel confirme le jugement de première instance reconnaissant le jugement étranger contre Notiplex. Par ailleurs, la Cour d'appelle renverse le jugement de première instance contre les autres défendeurs et rappelle le principe voulant que, saisie d'une demande de reconnaissance d'un jugement étranger, la Cour ne peut en changer les termes. Ainsi, il n'était pas possible de faire reconnaître un jugement contre des personnes qui n'étaient pas parties aux procédures américaines.
Référence : [2010] ABD 6
Référence : [2010] ABD 6
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