vendredi 2 février 2018

Il faut un refus clair de se soumettre à un interrogatoire pour justifier le rejet d'une action pour ce motif

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Le refus d'une personne de se soumettre à un interrogatoire peut justifier le rejet de son action ou de sa défense. Encore faut-il qu'il s'agisse d'un véritable refus et non seulement simplement d'une situation où la non présence de la personne lors de la date prévue pour l'interrogatoire explicable. C'est ce que rappelle l'Honorable juge Jacques Blanchard dans l'affaire Blanchet c. Agence du revenu du Québec (2018 QCCS 333).


Dans cette affaire, le juge Blanchard est saisi de la demande des Défendeurs pour faire rejeter le recours de la Demanderesse en raison de son défaut de se présenter à son interrogatoire préalable.

La Demanderesse fait valoir qu'elle ne refuse pas de se soumettre à un interrogatoire. C'est plutôt que son avocat a cessé d'occuper à peine sept jours avant la date prévue pour l'interrogatoire et qu'elle n'a pas eu le temps de mandater un nouvel avocat.

Le juge Blanchard souligne que le rejet d'une action pour cause de refus de se soumettre à un interrogatoire ne se justifie qu'en présence d'un véritable refus, et non pas dans une situation où l'absence de la partie s'explique par d'autres motifs. Pour cette raison, il rejette la demande de rejet:
[15] Refuser de se soumettre à un interrogatoire peut être sanctionné en vertu de l’article 51 C.p.c. dans la mesure où ce refus est considéré par le Tribunal comme une entrave au bon déroulement de l’instance. 
[16] Le rejet d’une procédure est une sanction ultime réservée pour les cas graves où une partie fait preuve d’un mépris évident quant aux règles de procédure ou le contrat judiciaire. 
[17] Toutefois, sans indice de mauvaise foi ou de témérité, tout retard à exécuter une ordonnance ne constitue pas nécessairement de l’abus :
[45] Pour conclure en l’abus, il faut donc des indices de mauvaise foi (telle l’intention de causer des désagréments à son adversaire plutôt que le désir de faire reconnaître le bien-fondé de ses présentations) ou à tout le moins des indices de témérité. 
[18] En l’espèce, le Tribunal est d’opinion, suivant le témoignage sincère de madame Poirier Blanchet, que l’annulation de son interrogatoire fixé le 31 août 2017 est justifiée et ne constitue clairement pas un abus. 
[19] Le court délai entre l’avis de cesser d’occuper des avocats de la demanderesse et la date de son interrogatoire ne lui est pas imputable et cette dernière a le droit d’être assistée par un membre du barreau lors de son interrogatoire. 
[20] De plus, le Tribunal ne peut inférer que l’annulation de son interrogatoire constitue un refus manifeste de s’y soumettre d’autant plus que les motifs qu’elle invoque sont suffisants. 
[21] Bien que le Tribunal considère que le respect des ordonnances est essentiel, il ne peut adhérer à la thèse des défendeurs et conclure que le comportement de la demanderesse est abusif.
Référence : [2018] ABD 50

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