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On disait jadis que la scission d'instance était exceptionnelle, mais c'est de moins en moins vrai. On ne peut pas dire que la scission d'instance est la norme puisque l'unicité de l'instance demeure la norme, mais la scission n'a plus le caractère exorbitant d'il y a quelques années. C'est ce que souligne l'Honorable juge Florence Lucas dans l'affaire Succession de Côté-Drouin c. Pepin (2017 QCCS 47).
Dans cette affaire, la juge Lucas est saisie de la demande en scission d'instance des Défendeurs. En effet, ceux-ci demandent que la Cour tranche d’abord le débat sur les droits d’auteur et, en second lieu, la quantification des dommages et la restitution des actifs, le cas échéant. Ils soumettent essentiellement que la preuve complexe des dommages pourrait devenir inutile ou être fortement limitée par un premier jugement sur les questions relatives aux droits d’auteur. Ainsi, ils suggèrent que la scission d’instance permet de limiter le temps, les ressources et les frais consacrés à la suite du litige, et ce, dans l’intérêt des parties et de la justice.
Le Demandeur conteste la demande, estimant qu'il s’agit d’une stratégie des Défendeurs pour éviter de produire dès maintenant des documents et contrats pertinents.
Dans son jugement qui accueille la demande de scission et alors qu'elle passe en revue les principes juridiques applicables, la juge Lucas souligne que la scission n'est plus une mesure exceptionnelle:
[20] Cette disposition reprend essentiellement l’article 273.1 sous l’ancien Code de procédure civile (c. C-25), apportant certaines modifications, en permettant notamment au tribunal d’agir d’office pour scinder l’instance.
[21] La scission d’instance s’inscrit dans un contexte d’efficacité et de saine gestion de la justice. Depuis 2003, elle n’est plus appliquée de façon exceptionnelle, quoique l’unicité de l’instance demeure la règle. Il revient à la partie qui demande la scission d’établir pourquoi elle devrait être ordonnée.
[22] Les critères généralement appliqués pour déterminer s’il y a lieu de scinder une instance sont les suivants :
1) La simplicité relative des questions à débattre lors de la première étape.
2) La mesure dans laquelle les questions à juger dans la première étape sont étroitement liées à celles qui seraient abordées dans la seconde.
3) La question de savoir si la décision qui sera rendue à l’issue de la première étape est susceptible de mettre fin à tout le litige, à limiter la portée des questions à débattre dans la seconde ou à augmenter sensiblement les chances d’en arriver à un règlement.
4) La mesure dans laquelle les parties ont déjà consacré des ressources à l’ensemble des questions en litige.
5) La date retenue pour le procès et les risques de délais.
6) Tout avantage que la scission est susceptible de procurer aux parties ou tout préjudice qu’elles risquent de subir.
7) La question de savoir si la requête est présentée de consentement ou si elle fait l’objet d’une contestation.
[23] L’affaire 9091-9572 Québec inc. c. Construction Module II inc. résume ainsi la démonstration requise :
[16] Enfin, il faut évaluer les avantages pouvant découler de la scission à l’aune du principe de l’unicité du procès qui transcende notre procédure civile. En effet, on connaît depuis longtemps les avantages de procéder le plus rapidement et une fois pour toutes à l’audition d’une cause au fond par rapport à des auditions partielles saupoudrées au fil du temps.
[17] C’est pour cette raison qu’il faut qu’il soit apparent qu’il existe un avantage marqué de procéder à la scission d’une instance et qu’il n’existe pas d’autres moyens pour obvier aux problèmes que la demande de scission a pour but de contourner. En effet, il faut éviter que la demande de scission ne devienne elle-même un procès dans le procès sur les mérites relatifs de la scission.
Référence : [2017] ABD 20[Nos soulignés.]
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