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Contrairement à la preuve profane où le choix entre deux versions contradictoires est surtout une question de crédibilité, la preuve par expert répond à un autre impératif important. En effet, le choix entre deux thèses contradictoires reviendra souvent à la question de savoir laquelle cadre le mieux avec la preuve faite à l'audition. Ainsi, un expert peut-être parfaitement crédible et qualifié, et sa thèse toujours pas retenue. L'affaire Service d'excavation Jacques Lirette inc. c. Economical, compagnie d'assurances (2014 QCCA 2139) illustre cette réalité.
Dans cette affaire, l'Appelante se pourvoit contre un jugement de la Cour supérieure qui a déclaré bon, valable et partiellement libératoire le montant des offres et des consignations effectuées par l’Appelante au montant de 66 529,12 $, en plus des intérêts limités à la somme de 8 080,12 $, a condamné l’Appelante à payer à l’intimée la somme de 160 790,26 $, plus les intérêts et l’indemnité additionnelle, et a condamné l’Appelante à verser à l’Intimée la somme de 34 407,94 $ pour les frais des experts, le tout avec dépens.
Les faits de l'affaire sont assez simples.
En août 2006, une rétrocaveuse appartenant à l’Appelante heurte le coin nord-est du chalet en bois rond appartenant au couple Thebarge, assuré de l’Intimée. Le moteur de la rétrocaveuse a calé, de telle sorte que les freins hydrauliques et manuels n’ont pas fonctionné correctement et que la rétrocaveuse a dévalé une pente et percuté l’immeuble.
L’Appelante ne conteste pas sa responsabilité. Elle conteste toutefois la méthode préconisée par l’Intimée pour réparer l’immeuble et l'étendue des dommages. Une bataille d'expert s'engage donc.
L'Appelante fait reproche au juge de première instance de ne pas avoir retenu la thèse de son expert, nonobstant le fait qu'il a qualifié cet expert de crédible et de sommité en la matière.
Une formation unanime de la Cour composée des Honorables juges Pelletier, Kasirer et Bélanger rejette cette prétention et souligne qu'un expert peut être parfaitement crédible et qualifié, et sa thèse mise de côté:
[18] L’appelant reproche au juge d’avoir accordé peu de poids au témoignage de l’expert Julien. Il est vrai que le juge a qualifié ce témoin de « crédible » et de « sommité » sans toutefois retenir la méthode de réparation qu’il préconisait. En réalité, ce deuxième reproche consiste, encore une fois, à demander à la Cour de substituer son appréciation de la preuve d’expert à celle du juge, car l’appelante estime que ce témoignage corrobore, sur plusieurs points, celui de l’expert Fournier.
Référence : [2015] ABD Expert 34[19] Or, le juge retient que l’expert Julien n’a pas eu l’opportunité de visiter les lieux et qu’il a rédigé son rapport en fonction des observations de l’expert Fournier. Ainsi, cet expert en construction, qui n’est pas ingénieur, soumet une méthode différente pour corriger la situation, à partir des constatations de l’expert Fournier. Il n’est pas étonnant dans ces circonstances que le juge ne fasse pas grand état de ce témoignage surtout que l’estimateur en sinistre de l’appelante a critiqué la solution qu’il a avancée.
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