mardi 18 novembre 2014

L'équité procédurale est à son plus bas niveau au sein d'une personne morale de droit privé

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

L'intensité du devoir d'équité procédurale dépend des situations. On dira généralement qu'il s'agit de la protection procédurale minimale à laquelle a droit une partie dans des circonstances particulières. Le niveau le plus bas d'équité procédurale s'applique probablement au sein d'une personne morale de droit privé où le fait d’avoir suivi la procédure prévue au contrat et d’avoir entendu la personne dont les droits peuvent être affectés est suffisant selon la Cour d'appel dans Berthiaume c. Carignan (2014 QCCA 2092).
 

Dans cette affaire, l’Appelante se pourvoit contre un jugement de la Cour supérieure qui a rejeté son action en dommages et intérêts. Le juge de première instance - l'Honorable juge Marc-André Blanchard - a aussi déclaré abusives ses procédures à l’égard de 9 des 11 Intimés et l’a condamnée à leur rembourser leurs honoraires extrajudiciaires ainsi que des dommages et intérêts pour le stress et les inconvénients subis.
 
L'Appelante fait valoir une multitude de moyens en appel, dont le fait que les Intimés auraient violé ses droits à l'équité procedural en l'expulsant de la société dans laquelle ils étaient tous associés.
 
Dans un jugement unanime rendu par les Honorables juges Thibault, Gagnon et Vauclair la Cour rejette l'appel. Sur la question de l'équité procédurale, la Cour souligne que l'intensité de cette obligation est à son plus bas niveau au sein d'une personne morale de droit privé et que, dans la mesure où la procédure contractuelle est suivie et que l'Appelante a eu la chance de se faire entendre, on ne conclura pas à violation:
[32]            Les règles de justice naturelle sont souples et dépendent du contexte. Elles comprennent, à leur niveau le plus fondamental, la nécessité d’un avis et la possibilité de répondre à ce qui est reproché. Quant au contenu du droit d’être entendu, Patrice Garant explique : 
(…) cela signifie essentiellement, suivant l’expression même du juge Pigeon de la Cour suprême, avoir « le droit de faire valoir ses moyens ». Suivant la jurisprudence, l’administré concerné doit avoir au minimum la possibilité de faire valoir ses représentations ou son point de vue, quelle que soit la méthode utilisée (…). 
[33]            Le fait qu’il existait un consensus chez les associés dès le 2 septembre selon lequel ils ne souhaitent plus que l’appelante fasse partie de la SORAD a-t-il eu pour effet de priver cette dernière de ses droits procéduraux? 
[34]            L’intensité de l’obligation d’équité procédurale varie selon le contexte. Dans une situation de rapports de droit privé, le fait d’avoir suivi la procédure prévue au contrat et d’avoir entendu la personne dont les droits peuvent être affectés est suffisant. Cela s’est produit lors de la réunion formelle du 9 décembre 2009. On ne peut empêcher les associés d’une société privée de tenir des discussions informelles et de se faire une opinion sur une question avant la tenue d’un vote. Ce qui est exigé d’eux, c’est d'adopter une conduite juste et de respecter les principes qui ressortent implicitement du contrat qu’ils ont conclu, soit, en l’espèce, de donner à leur collègue la chance d’être entendue avant que le vote ait lieu.  
[35]            Rien dans la preuve n’indique que les associés ne pouvaient pas changer d’idée lors de la réunion du 9 décembre 2009 ou qu’ils étaient liés d’une quelconque autre manière. L’expulsion du 9 décembre résulte, au premier chef, du dépôt par l’appelante d’une action en justice concluant à la dissolution de la société. Jusqu’à cette date, les faits indiquent que l’appelante en constituait toujours un membre à part entière.
Référence : [2014] ABD 459

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