mardi 21 janvier 2014

Le choix difficile à faire quant au secret professionnel dans le cadre de certaines requête en disqualification

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

L'importance du secret professionnel ne fait aucun doute, tout comme l'étendue des efforts qui seront déployés par les tribunaux pour protéger celui-ci. Reste qu'il existe des circonstances où le maintien absolu du secret professionnel et les prétentions d'une partie sont fondamentalement incompatibles. C'est le cas lorsqu'une partie demande la disqualification du procureur de la partie adverse au motif qu'il ou elle a eu accès à de l'information protégée par le secret professionnel. Il ne saurait alors être question de refuser de dévoiler de quelle information il s'agit comme le souligne l'affaire 3236013 Canada Inc. (Planète Mobile) c. Rosenberg (2014 QCCS 87).


Dans cette affaire, les Demanderesses ont intenté des procédures civiles pour réclamer aux Défendeurs leur part des sommes investies dans la Mise-en-cause à titre d'actionnaires. 
 
Suite à la comparution du procureur des Défendeurs, les Demanderesses ont déposé une requête en disqualification de celui-ci. Elles demandent en effet que le procureur soit déclaré inhabile à occuper pour les Défendeurs au motif qu’il a dans le passé réalisé des mandats à titre d’avocat pour la Mise en-cause et, dans le cadre de ceux-ci, a eu accès à des informations privilégiées ou confidentielles et que son intervention pour les Défendeurs en l’instance le place en situation de conflit d’intérêts.
 
Dans le jugement qui nous intéresse, l'Honorable juge Christian J. Brossard est saisi du débat de certaines objections soulevées dans le cadre d'un interrogatoire sur affidavit (l'affidavit soumis à l'appui de la requête en disqualification).
 
Un des objections a trait à certaines questions qui cherchent à établir quelle est l'information privilégiées ou confidentielle à laquelle le procureur a eu accès. Les Demanderesses s'objectent au motif que seule la Mise-en-cause pour révéler cette information puisque elle seule pour renoncer au secret professionnel en question.
 
Le juge Brossard met de côté cette argumentation et souligne que l'on ne peut simultanément alléguer communication d'information couverte par le secret professionnel comme motif de disqualification et refuser d'identifier cette information au nom du secret professionnel:
[31]        La nature de l’information communiquée sera certes un élément important dans la détermination de son caractère privilégié ou de sa confidentialité. 
[32]        Or, comment les défendeurs et Me Ovadia peuvent-ils tester la vérité des faits attestés par le déclarant et vérifier le caractère sérieux de sa déclaration sous serment s’ils ne peuvent lui demander à quelles informations il réfère, à tout le moins connaître la nature de cette information ? 
[33]        D’autre part, l’argument des demanderesses paraît jusqu’à un certain point circulaire. La prétention des demanderesses est que Me Ovadia détient des informations privilégiées et confidentielles, résultant des mandats qu’il a obtenus d’Eldorado. Si Me Ovadia détient déjà cette information, lui préciser à quelles informations le déclarant réfère ne portera pas atteinte au secret professionnel ou à la confidentialité de l’information. Il en est de même du défendeur Rosenberg. L’avocat des demanderesses reconnaît que celui-ci, à titre de président d’Eldorado, est lui-même déjà détenteur de toute information privilégiée ou confidentielle dont Eldorado est titulaire. 
[34]        Toutefois, des moyens doivent être mis en place pour éviter que les réponses qui seront données, le cas échéant, pouvant contenir de l’information effectivement privilégiée et confidentielle, soient communiquées ou autrement divulguées à quiconque autre que Me Ovadia ou le défendeur Rosenberg sans l’autorisation d’un juge.
Référence: [2014] ABD 30

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