Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
L'importance du secret professionnel dans toute société de droit n'est plus à établir. Sans lui, il serait impossible aux justiciables de parler en toute liberté à leur avocat sans crainte de préjudice. Il ne faut donc pas se surprendre de savoir que le secret professionnel couvre également les communications entre le justiciable et le personnel de son avocat (pensons à une assistante qui complète un formulaire d'ouverture de dossier par l'assistance d'un avocat ou parajuriste qui discute avec le client par exemple). La Cour suprême confirmait cette réalité dans Descôteaux c. Mierzwinski ([1982] 1 R.C.S. 860).
Il s'agit en l'espèce d'une cause provenant du Québec.
Aux fins d'obtenir la preuve que l'Appelant (qui requerrait de l'aide juridique) a commis un acte criminel en déclarant faussement des revenus inférieurs afin d'être éligible aux services de cet organisme, deux agents de la paix se sont présentés au bureau de l'aide juridique munis d'un mandat de perquisition. Ce mandat visait certains documents dont le formulaire «Demande d'aide juridique» qui contient entre autres des renseignements sur l'état financier de l'Appelant.
Lors de la perquisition les documents ont été placés sous scellé afin que les tribunaux québécois puissent décider si les déclarations contenues dans le formulaire (lesquelles n'ont pas été donné à un avocat, mais plutôt au personnel du bureau) sont couvertes par le secret professionnel.
La Cour suprême, dans un jugement unanime rendu sous la plume du regretté Antonio Lamer, vient confirmer la décision de la Cour d'appel du Québec et décrète que le formulaire n'est couvert par le secret professionnel. Cependant, le juge Lamer indique que les communications faites par un justiciable au personnel de son avocat sous couvertes par le secret professionnel, mais qu'en l'instance il existe d'autres considérations qui ont fait perdre la protection du secret professionnel:
Avec respect pour l'opinion contraire, j'estime cependant que, en principe, les renseignements ayant trait à l'état financier ainsi que ceux concernant le fondement du droit et tous autres requis par la corporation ou par règlement (Loi sur l'aide juridique, art. 64) qu'un requérant d'aide juridique doit fournir pour obtenir les services d'un avocat sont, sauf les cas d'exception dont je traite plus loin, privilégiés. Je partage par ailleurs l'avis de la Cour d'appel du Québec que, en l'espèce, les renseignements ayant trait aux moyens financiers de Marcellin Ledoux avaient perdu le bénéfice du privilège de confidentialité puisque, eu égard au libellé du mandat de perquisition, ils auraient été communiqués dans le but d'obtenir criminellement un avantage et, de ce fait, relèvent d'une des exceptions au principe du privilège prévues par la common law. Par ailleurs, comme il est allégué que le crime n'aurait été commis par des faux semblants que quant à l'état financier du requérant, les notes professionnelles, qui concernent le fondement de son droit, demeurent privilégiées.
[...]
Consulter un conseiller juridique inclut la consultation de ceux qui l'assistent de façon professionnelle (v.g. sa secrétaire, son stagiaire) et qui ont eu comme tel accès aux communications faites par le client dans le but d'obtenir un avis juridique.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/18uAacIIl y a des exceptions. Il ne suffit pas de parler à un avocat ou l'un de ses collaborateurs pour que dès lors tout soit confidentiel. Il faut que la communication soit faite à l'avocat ou à ses collaborateurs en leur qualité professionnelle; la relation, au moment précis de la communication, doit être de nature professionnelle. Ne seront pas non plus confidentielles les communications faites dans le but de perpétrer plus facilement un crime ou une fraude, et ce, que l'avocat soit de bonne ou mauvaise foi.
Référence neutre: [2013] ABD Rétro 49
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