vendredi 13 septembre 2013

Public et prescriptible

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

La question du délai de prescription applicable à l'action en nullité en matière de droit public suscite une certaine controverse. En effet, plusieurs auteurs sont d'avis qu'un tel recours est imprescriptible lorsqu'il s'agit d'une nullité absolue. Or, dans Thibault c. Fortin (2013 QCCS 3961), l'Honorable juge Étienne Parent, s'appuyant sur une décision récente de la Cour d'appel, en vient à la conclusion qu'un tel recours se prescrit effectivement, mais par dix ans (et non trois).
 

Dans cette affaire, les Demandeurs allèguent que le Défendeur, par le truchement de sa conjointe, la Défenderesse, a acquis de la mise en cause un immeuble en contravention de l'article 304 de la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités.
 
Les Demandeurs recherchent donc une déclaration d'inhabilité contre le Défendeur à exercer la fonction de membre du conseil de la Ville et l'annulation du contrat de vente de l'immeuble.
Une des questions qui se pose dans le cadre de l'affaire est celle du délai de prescription qui est applicable en l'instance puisque les Demandeurs prennent leur recours cinq ans après leur connaissance de la cause d'action.
Les Demandeurs plaident que la nullité absolue en droit public est imprescriptible, se fondant sur l'opinion de certains auteurs. Le juge Parent rejette cette prétention en citant une décision de la Cour d’appel (Raymond Chabot inc. c. La Fondation communautaire de Lachine, 2013 QCCA 890):
[64]  Tout recours est assujetti aux règles de la prescription du Code civil faute de disposition particulière. L’action en nullité de droit public n’échappe pas à cette règle de droit commun, tel que l'enseigne Pierre-Basile Mignault, Traité de droit civil canadien, t. 9, Montréal, Wilson & Lafleur, 1916. À la p. 472 et suivantes, il souligne que l'art. 2242 du Code civil du Bas-Canada est très large d’application vu « la généralité des termes de l’article » « toutes choses, droits et actions », et constitue la prescription de droit commun. Ceci demeure vrai sous le nouveau code civil qui énonce les règles de base du système juridique québécois dans tous ses aspects (voir le préambule du Code civil du Québec).
Heureusement pour les Demandeurs, le juge Parent rejette également la prétention des Défendeurs à l'effet que le délai de prescription applicable est celui de trois ans.
 
En effet, se basant sur la même décision de la Cour d'appel, il est d'avis que le délai de prescription applicable est celui de dix ans:
[69]  Seule la prescription décennale est applicable à l'action en nullité de droit public puisqu'elle ne tend pas à faire valoir un droit personnel, comme le souligne ma collègue la juge Duval Hesler, alors à la Cour supérieure, dans Comité des citoyens de la Presqu’île-Lanaudière c. Québec (Procureur général), 2006 QCCS 4861 , qui résume très bien l'état actuel du droit (…)
Référence neutre: [2013] ABD 368

Le présent text a initialement été publié sur le site d'actualité juridique Droit inc. le 4 septembre 2013.

5 commentaires:

  1. Bonjour,
    comment fait-on pour savoir si l'action est de droit public. ex. est-ce que la loi des régimes complémentaires de retraite est une loi de droit public?

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  2. Bonjour Anonyme.

    La question n'est pas de savoir si la loi invoquée est une loi de droit public, mais plutôt de déterminer si le droit invoqué l'est dans l'intérêt public vs. un droit personnel. Par exemple, si vous réclamez un montant personnellement, il ne s'agit pas d'une action de droit public.

    Bonne journée,

    Karim Renno

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    Réponses
    1. merci beaucoup,
      Je ne suis pas certain si je comprends bien.
      Je suis allé voir sur wikipédia est dans la définition de droit public Il est écrit que
      le droit administratif, qui réglemente la structure de l'administration et ses rapports avec les particuliers fait partie du domaine du droit public.
      Donc, si on est un groupe d'ex-participants d'un fond de pension privé et si l'administrateur public de la loi de pension privé n'a pas fait les enquêtes requises ce qui a eu comme connaissance de réduire nos rentes de pension. C'est sûr que nous voulons réclamer les montants que nous aurions dû percevoir s'il n'avait pas été selon nous, de la mauvaise administration des lois de fond de pension privé.
      merci beaucoup de préciser si le droit administratif ce que je crois être la loi des régimes de retraite privé (RCR ou LRCR de l'Ontario) sont prescrits après 10 ans ou 3 ans.

      http://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_public

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    2. 1. Est-ce que si l'action en justice aurait pu être entrepris par un ministre contre l'administrateurdu régime de retraite privé en faute devient un droit public et à ce moment là, est-ce nécessaire que l'organisme public soit mis en cause afin d'obtenir un prescription de 10 ans?
      2. Si le ministre qui pourrait agir mais n'agit pas et laisse traîner le dossier; est-ce que si c'est une association de retraités qui représenteraitent les retraités floués auraient une prescription de 10 ans, vu que l'association n'a aucun intérêt personnel. merci beaucoup de me répondre

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    3. Vous comprendrez bien sûr que n'étant pas familier avec votre dossier, il m'est impossible de vous donner une opinion sur la question. Ceci étant dit, ce que vous me décrivez me laisse être un droit personnel et je vous recommenderais fortement de procéder sous la prémisse que le délai de prescription est de 3 ans.

      J'espère que cela vous est utile.

      Bonne journée,

      Karim Renno

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