Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
Le droit de la faillite est exorbitant du droit commun dans la mesure où il est un droit d'exception créé par le législateur pour assurer un déroulement ordonné dans les situations d'insolvabilité. Il n'est donc pas surprenant de noter que la discrétion judiciaire joue un rôle important dans la matière. Ainsi, comme le souligne la Cour supérieure dans Consortium DSL (Syndic de) (2013 QCCS 4177), le juge saisi d'une requête en faillite possède la discrétion de la refuser même lorsque les critères pertinents sont tous satisfaits.
Dans cette affaire, la Demanderesse présente une requête pour mise en faillite contre la Débitrice par laquelle elle recherche une ordonnance de séquestre et la nomination d'un syndic. Elle allègue être créancière et que la Débitrice a commis un acte de faillite.
L'Honorable juge Yves Poirier constate effectivement que la Demanderesse rencontre tous les critères pour avoir droit à la mise en faillite de la Débitrice. Citant sa discrétion en la matière il refuse cependant de le faire au motif qu'il ne serait pas souhaite pour la masse des créanciers de mettre la Débitrice en faillite:
[50] La Cour d’appel dans l’affaire Kafko mentionne à ce sujet :
« 16 Dans le présent dossier, l'examen des pièces et de la preuve démontrait l'existence d'un débat sérieux quant à l'existence même du cautionnement que Kafko prétendait avoir obtenu. La solution du litige exigeait plus qu'un examen sommaire des prétentions des parties pour conclure à la faiblesse de la défense proposée. Il fallait apprécier une preuve documentaire et testimoniale relativement étendue pour identifier et qualifier correctement les relations juridiques des parties. L'interprétation de cette preuve laissait place à des incertitudes importantes. Le juge de faillite ne devait pas alors tenir le procès à la place de la cour civile, mais se limiter à l'appréciation du caractère litigieux de la créance et partant, de la seule recevabilité de la requête pour ordonnance de séquestre.»
[51] Le Tribunal siégeant en matière de faillite doit donc éviter, dans le cas d’incertitude importante quant au caractère litigieux d’une créance, de trancher un débat qui parait sérieux à première vue. L’appréciation de la preuve documentaire et testimoniale permettant d’établir l’étendue des relations juridiques liant les parties (PLP, DSL et 9146-0303 Québec inc.) doit être examinée dans son entièreté par une cour civile. L’interprétation des divers actes juridiques conclus entre PLP, 9146-0303 Québec inc., Luc Poirier et DSL peuvent amener, suivant la preuve soumise, un tribunal à considérer comme un tout la Créance et les obligations non remplies. Le Tribunal retient que la présente situation origine de l’autorisation donnée par monsieur Luc Poirier à DSL de débuter la construction des maisons bien que les obligations de 9146-0303 Québec inc. ne sont pas remplies. Le procureur de DSL soulève un argument qui repose sur les dispositions de l’article 317 du Code civil du Québec et qui semble prima facie sérieux, considérant les faits mis en preuve. Tous ces éléments doivent être analysés et appréciés par un tribunal civil.
[52] Dans l’affaire Italia, le tribunal expose le cadre d’application de cette discrétion judiciaire :
« [38] […] Il s’agit essentiellement d’une question de discrétion du tribunal, laquelle doit être exercée judiciairement en examinant le contexte, la bonne foi des parties et une vérification par le juge du principe qui veut que l’on ne doit pas se servir du processus de la faillite à des fins inappropriées. Il s’agit avant tout d’une question de fait qui sera analysée sous l’angle de la bonne foi et de l’équité. Toute décision sur le sujet se façonne dans son milieu ambiant. »
[53] Le lien entre PLP, 9146-0303 Québec et Luc Poirier dans le cadre de l’Offre et les autorisations données à DSL lui permettant d’ériger huit maisons, sur le Terrain alors que ce dernier ne lui appartient pas, amène le Tribunal à exercer sa discrétion judiciaire afin de rejeter la présente requête, DSL ayant démontré l’existence d’un litige reposant sur l’absence de bonne foi des parties qui pourrait, si la preuve est établie, entrainer une solution favorable à DSL.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/1alJe2U[54] Se référant à l’article 43 (7) LFI, le Tribunal rejette la présente requête et exerce ainsi sa discrétion judiciaire considérant le contexte de l’affaire et l’engagement pris par monsieur Luc Poirier d’autoriser DSL à procéder à l’érection de huit maisons sur un Terrain appartenant à l’une de ses sociétés (9146-0303 Québec inc.).
Référence neutre: [2013] ABD 359
Autres décisions citées dans le présent billet:
1. 1224-2927 Québec inc. c. Kafko Manufacturing Ltd., 1996 CanLII 6187 (C.A.).
2. Italia (Syndic de), 2010 QCCS 645.
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