mardi 6 août 2013

La Cour d'appel en vient à la conclusion qu'un quatrième procès criminel sur les mêmes accusations en l'absence de toute preuve nouvelle constituerait un abus, de sorte que l'on ne devrait pas accéder d'extrader une personne dans de telles circonstances

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

On le sait bien, plus une décision relève du pouvoir discrétionnaire d'un officiel, plus il sera difficile de convaincre les tribunaux québécois d'intervenir en révisant cette décision. C'est le cas en matière d'extradition où le pouvoir du ministre de la justice du Canada est presque purement discrétionnaire. Or, nonobstant ce fait, dans Barnaby c. Canada (Attorney General) (2013 QCCA 1305), la Cour d'appel est venue mettre de côté une décision en matière d'extradition au motif que d'intenter un quatrième procès criminel contre une personne en l'absence de quelque preuve nouvelle est un abus qui aurait dû amener le ministre à refuser la demande d'extradition.

Dans cette affaire, la Cour est saisie d'une demande de révision judiciaire à l'encontre de la décision du ministre de la justice d'extrader deux personnes vers les États-Unis pour qu'ils soient cités à procès pour des accusations de meurtre au 1er et 2e degré.
 
Pour l'une de ces personnes, la Cour rejette la demande de révision, soulignant que celle-ci avait été initialement accusée en 1990 aux États-Unis, mais qu'aucun procès n'a eu lieu à la lumière du retrait des accusations. Une nouvelle preuve par ADN a depuis été découverte, de sorte que la Cour ne voit pas d'abus dans le désir des autorités américaines de tenir un procès à cet égard.
 
La situation est différente pour la deuxième personne. Elle a déjà été citée à procès trois fois pour les mêmes accusations et, à chaque reprise, le jury a été incapable d'en venir à un verdict. Les autorités américaines veulent maintenir tenir un quatrième procès plusieurs années plus tard, sans pour autant avoir de preuve nouvelle à offrir. Pour la Cour, il s'agit d'un abus et le ministre a exercé sa juridiction de manière déraisonnable en accédant à la demande d'extradition:
[13] There is simply no precedent for submitting an accused to the stress and tribulations of a fourth trial on the same charges, particularly when the only true “new evidence”, in this instance, the DNA evidence, does not in any way implicate him and three previous juries did not once find him guilty.  
[14] The issue, therefore, is whether a fourth jury trial in these exceptional circumstances would, in the absence of any true new evidence linked to Applicant Barnaby, constitute an outrage, in his case, to the community’s sense of fair play and decency, so as to amount to an affront to the fundamental principles of justice applicable in both jurisdictions of concern, and thus constitute an abuse of process. The prosecution is not, after all, expected to go after an accused until it finds a judge or jury willing to convict. 
[15] With due deference to the Minister, in the present case, a fourth trial would be contrary to the protection afforded by the Charter and his decision to extradite does not constitute a defensible conclusion based on the alleged new facts in the case of Applicant Barnaby.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/1baAQDr

Référence neutre: [2013] ABD 312

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