dimanche 10 mars 2013

Dimanches rétro: la nécessité d'alléguer des faits précis pour obtenir l'exécution provisoire

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Dans les cas où la loi ne prévoit pas l'exécution provisoire automatique, il faut démontrer une urgence exceptionnelle ou une autre raison jugée suffisante pour convaincre la Cour de passer outre la règle générale voulant que le jugement n'est exécutoire que lorsque final. Or, comme le soulignait l'Honorable juge Lorne Giroux dans Banque Nationale du Canada c. Bédard (2007 QCCA 1796), pour se faire il faut alléguer des faits précis et non pas seulement faire valoir une opinion ou un argument général.



Dans cette affaire, l'Intimé demande l'exécution provisoire d'un jugement de première instance qui a ordonné à l'Appelante de lui rembourser certains montants pris dans son compte de banque. L'Intimé n'avait pas demandé l'exécution provisoire en première instance, mais il demande à un juge unique de la Cour d'appel de le faire.

Le juge Giroux est d'opinion que les allégations de l'Intimé ne sont pas suffisantes, puisqu'elles constituent des énoncés généraux et l'expression d'une argumentation, plutôt que des faits précis:
[4]               Pour justifier sa demande, l’intimé plaide essentiellement qu’il est propriétaire des sommes contenues dans ses comptes et, qu’en conséquence, il veut être mis en possession de ces sommes pendant l’appel. Sans se prononcer sur la valeur d’un tel argument, force est de constater qu’il concerne davantage le fond de l’appel. En tenant compte du fait qu’une requête de l’intimé pour rejet d’appel a été rejetée, il faut donc constater le sérieux apparent de l’appel. 
[5]               Par ailleurs, l’intimé n’a pas fait la démonstration de faits qui autoriseraient un juge d’exercer le pouvoir discrétionnaire d’ordonner l’exécution provisoire malgré l’appel. En l’espèce, la seule allégation générale selon laquelle l’exécution provisoire demandée aura pour effet de rétablir un certain équilibre entre les parties et de permettre à l’intimé d’utiliser ses propres actifs pour se défendre ne satisfait pas les critères applicables. 
[6]               En effet, tel qu’indiqué dans l’affaire Lebeuf 
« … il appartient au requérant, intimé en appel, de faire la démonstration des faits qui autoriseraient un juge d’exercer ce pouvoir discrétionnaire. En raison du caractère particulier du remède recherché, il doit, pour satisfaire son fardeau, dépasser le stade des allégations vagues, générales ou hypothétiques et étayer son dossier de faits précis, clairs et concrets. Pour cela, puisque la Cour n’est pas une instance de procès, il devra soumettre affidavits et documents, seule façon de présenter une preuve en appel, sauf circonstances très exceptionnelles. » 
[7]               En l’absence de tels faits précis, clairs et concrets, la requête doit être rejetée.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/XImBDl

Référence neutre: [2013] ABD Rétro 10

Autre décision citée dans le présent billet:
 
1. Lebeuf c. Groupe SNC-Lavalin inc. [1995] R.D.J. 366 (C.A.).

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