Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
On peut prévoir, dans un contrat, une clause d'élection de for donnant juridiction internationale aux tribunaux québécois ou prévoyant que tout litige entre des parties québécoises devra être débattu dans un district particulier. Dans Entreprises Rodrigue Piquette inc. c. Hydro-Québec (2012 QCCS 5835), la Cour supérieure devait décider si la deuxième de ces clauses, lorsque contenue dans un contrat d'adhésion, peut être déclarée abusive et annulée.
Dans cette affaire, la Défenderesse, invoquant la clause d'élection de for stipulée en faveur des tribunaux du district de Montréal, présente un moyen déclinatoire demandant le renvoi du dossier dans ce district. La Demanderesse conteste cette requête et invoque le caractère abusif de la clause d'élection de for, laquelle est contenue dans un contrat que la Demanderesse prétend être d'adhésion.
L'Honorable juge Martin Dallaire en vient effectivement à la conclusion que le contrat intervenu entre les parties en est un d'adhésion. Il s'attaque ensuite à la question de savoir si une telle clause d'élection de for peut être annulée. Encore une fois, il répond à cette question par l'affirmative:
[12] Pour contrer cette prétention, la défenderesse invoque une clause d’élection de domicile contenue dans les règles générales du contrat type transmis et souscrit par la demanderesse.
[13] On soutient que cette clause est abusive puisqu’elle émane d’un contrat d’adhésion, et ce, en se basant sur une décision du juge Ivan St-Julien, laquelle n’a pas fait l’objet d’un appel :
« [4] Le Tribunal réfère à une décision rendue par notre collègue, la juge Courteau, soit HSBC BANK c. MIKE NYTSCHYK. Les principes élaborés dans cette décision soit à l’effet que la clause faisant l’objet de choisir le district de Montréal dans ce cas était abusive et exorbitante.
[...]
[7] Dans le cas qui nous occupe, il a été admis que le contrat a été formé au moment où Les Équipements J.V.C. inc. recevait l’acceptation, soit à Chibougamau, district d’Abitibi. De plus, les travaux visés par ce contrat ont été effectués à Eastmain, aussi dans le district d’Abitibi.
[8] Le Tribunal considère que la formule employée dans le contrat P-1 est du type de contrat d’adhésion et qu’elle est abusive et exorbitante ».
[...]
Commentaire:[27] Vouloir contraindre à l’avance à ce que tout le débat se fasse à partir de Montréal apparaît aux yeux du tribunal, dans le présent contexte et en fonction de la nature même de l’entreprise, comme étant excessif et disproportionné.
Ceux qui ont de l'expérience en matière de droit international privé auront immédiatement noté que la solution adoptée ici est contraire à celle qui prévaut dans le cas d'une clause d'élection de for international. En effet, dans ce cas, la Cour d'appel nous enseigne qu'on ne peut annuler une clause d'élection de for au motif qu'elle est abusive et contenue dans un contrat d'adhésion (voir United European Bank and Trust Nassau Ltd. c. Duchesneau, 2006 QCCA 652).
Je ne suggère pas, par ailleurs, que ces deux courants sont contradictoires. La logique de la règle "internationale" est que les tribunaux québécois n'ont pas la compétence pour se prononcer sur la validité de la clause en question, seulement pour déterminer si l'élection de for respecte les règles de droit international privé québécoises. Or, lorsque l'on parle d'une clause d'élection de for "locale", ce raisonnement ne s'applique de toute évidence pas.
Le texte intégral du jugement est disponible ici:
http://bit.ly/THQ6NVRéférence neutre: [2012] ABD 440
Autre décision citée dans le présent billet:
1. Équipements (Les) J.V.C. inc. c. Hydro-Québec, C.S. Abitibi, no 170-17-000003-033, 1er octobre 2003, j. St-Julien.
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