par Karim Renno
Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.
Est-ce que l'inclusion d'une clause de préséance dans un contrat peut faire échec à l'utilisation d'une clause d'arbitrage prévue dans le même contrat? C'est la question que devait trancher l'Honorable juge Claude Auclair dans l'affaire Petrifond Fondation Compagnie Ltée. c. Groupe Aecon Québec Ltée. (2011 QCCS 2293).
Dans cette affaire, la Cour est saisi d'une requête introductive d'instance pour procéder à la nomination d'un arbitre. Il s'agit d'un litige qui naît d'une relation de sous-traitance.
Dans cette affaire, la Cour est saisi d'une requête introductive d'instance pour procéder à la nomination d'un arbitre. Il s'agit d'un litige qui naît d'une relation de sous-traitance.
La Défenderesse conteste cette requête au motif que, bien que le contrat de sous-traitance entre les parties prévoit l'arbitrage, le contrat principal entre la Défenderesse et le donneur d'ouvrage ne contient pas de telle clause et donne juridiction aux tribunaux de droit commun. Puisque le contrat de sous-traitance prévoit que le contrat principal aura préséance en présence d'un conflit, la Défenderesse plaide que la clause d'arbitrage est inapplicable.
Le juge Auclair est d'accord avec la position de la Défenderesse. En particulier, la crainte de jugements contradictoires dans le cadre d'un hypothétique litige entre le donneur d'ouvrage et la Défenderesse d'une part et du litige entre la Défenderesse et la Demanderesse d'autre part l'amène à donner effet à la clause de préséance:
[10] Le Tribunal est d'avis que la clause de préséance doit s'appliquer dans la présente instance sinon la défenderesse se retrouverait dans une situation fort inconfortable et pouvant faire face à des jugements contradictoires à savoir : le jugement devant les arbitres qui pourraient la condamner à une réclamation basée sur des travaux effectués hors contrat, alors que la Cour supérieure dans une cause entre le donneur d'ouvrage et la défenderesse pourrait arriver à la conclusion qu'une telle réclamation était comprise à l'intérieur du contrat, d'où jugements contradictoires.
[11] Le Tribunal ajoute que d'envoyer le dossier pour être tranché par les arbitres entraînerait des coûts importants qui peuvent facilement être évités, ayant une clause de préséance claire. Je peux conclure que la première condition, telle que fixée par l'honorable juge St-Pierre dans son jugement rendu dans Theodoros Nikiforos dans lequel elle précise le cadre d'analyse des demandes faites en vertu des articles 941.1 et 941.2 n'est pas rencontrée. Je constate qu'à cause de la clause de préséance, une convention d'arbitrage n'existe pas dans la présente instance.
[12] La demanderesse ne subit aucun préjudice de procéder devant la Cour supérieure.
Commentaire
Avec grand respect pour l'opinion exprimée par la Cour dans cette affaire, la possibilité de jugements contradictoires ne devrait pas mener à la mise de côté d'une clause d'arbitrage ou d'une clause de juridiction exclusive. C'est d'ailleurs ce qu'a décidé la Cour suprême dans l'affaire GreCon c. Dimter Inc. (J.E. 2005-1369) dans le contexte d'une action en garantie et ces enseignements ont été suivis par la Cour d'appel dans Robertson Building Systems Ltd. c. Constructions de la Source inc. (J.E. 2006-812) dans un contexte d'arbitrage similaire à celui en présence ici.
Ainsi, bien qu'il soit possible que la décision soit pleinement justifiée par les dispositions contractuelles et, en particulier, la clause de préséance (le contexte contractuel complet n'était pas reproduit dans le jugement, il est difficile de se faire une idée à cet égard), nous ne sommes pas d'accord avec le motif énoncé au support de la décision.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/isT5H5
Référence neutre: [2011] ABD 166
La Cour d'appel vient de confirmer ce jugement, sans pour autant discuter de la question de la possibilité des jugements contradictoires (voir ici: http://bit.ly/sLZ5pR).
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