mardi 5 avril 2011

Les déclarations du créancier de l'obligation ne peuvent avoir pour effet d'annuler le pacte de préférence

Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

En août 2010, nous attirions votre attention sur le fait que la violation d'un pacte de préférence ne peut mener à l'annulation d'une vente (voir http://bit.ly/Ljn5aG). Ainsi, le créancier de l'obligation peut demander une injonction si la vente n'a pas déjà été conclue (voir http://bit.ly/NEiGO7) ou intenter des procédures en dommages. Dans ce dernier cas, comme l'indique l'affaire Ferme Gross et Fils Inc. c. Fafard (2011 QCCS 1406), le fait que le créancier de l'obligation ai fait des déclarations qui laissaient croire qu'ils ne peuvent se permettre de faire l'acquisition de la propriété n'est pas suffisant pour conclure à la nullité de l'obligation.


Dans cette affaire, la Demanderesse réclame 397 000 $ au Défendeur à titre de dommages-intérêts contractuels qu'elle prétend avoir subis et résultants, selon elle, de la vente par celui-ci de sa terre à un tiers en violation du pacte de préférence qu'il lui avait consenti. La Demanderesse allègue plus précisément que le Défendeur a omis de porter à sa connaissance les offres reçues et d'avoir accepté l'une d'elles. De son côté, le défendeur soutient qu'il n'était plus lié par le pacte de préférence au moment où il a accepté l'offre d'achat d'un tiers puisque la Demanderesse lui avait expressément indiqué qu'au delà d'un certain prix, elle ne pouvait acquérir la terre.

L'Honorable juge Clément Trudel n'accepte pas la thèse de la défense. Même si la Demanderesse avait tenu les propos qui lui sont imputés, ceux-ci n'ont pas pour effet d'annuler ses obligations contractuelles:
[63] La demanderesse reproche au défendeur d'avoir contrevenu au pacte de préférence. À l'examen des termes du bail et quel que soit l'angle sous lequel on regarde l'affaire, il est manifeste que le défendeur, de son propre aveu, n'a porté aucune des offres reçues en cours de bail variant de 325 000 $ à 400 000 $, y compris celle d'Éric Fafard, à la connaissance de la demanderesse, le tout en violation du pacte de préférence.
[64] Même en tenant pour acquis que Gross lui a affirmé, au cours de l'été 2007, ne pas pouvoir payer plus de 340 000 $, le défendeur n'était pour autant pas délié de son obligation d'aviser la demanderesse « par écrit de toute offre qui pourrait lui être faite ou qu'il pourra faire lui-même ». C'est à tort que le défendeur a cru que, parlant de Gross et selon ses propres mots, c'était fini avec lui, qu'il ne s'en est plus occupé et qu'il l'a oublié. En effet, si le défendeur disposait en tout temps pendant le terme du bail de la faculté de vendre sa terre à un tiers, il devait toutefois fournir l'occasion à sa locataire, dans le délai de 20 jours de manifester son intention de l'acheter aux mêmes prix et conditions. Bien qu'il ait reçu quelques offres verbales, le défendeur n'en a porté aucune à la connaissance du représentant de la demanderesse. Ce faisant, le défendeur a contrevenu à son obligation. Cette violation du droit de préférence ou une préemption peut être sanctionnée par l'octroi de dommages-intérêts (art. 1397, al. 2 C.c.Q.).
[65] En conséquence, le Tribunal conclut que le défendeur a commis une faute contractuelle susceptible d'engager sa responsabilité.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/gnpFuX

Référence neutre: [2011] ABD 114

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