jeudi 11 novembre 2010

La prescription commence à courir dès qu'une personne a toute l'information nécessaire pour avoir connaissance de sa cause d'action

Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

La fixation du point de départ de la prescription est souvent une question épineuse dans les litiges civils. On dira généralement que la prescription commence à courir à partir du moment où la partie demanderesse connaît ou devrait connaître les éléments à la base de sa cause d'action. C'est particulièrement cette deuxième hypothèse (devrait connaître) qui pose problème. À cet égard, la récente décision de Constructions Bruno Maltais inc. c. Vallières (2010 QCCS 5299) est intéressante.


Dans cette affaire, un contrat verbal d'association est intervenu entre les parties et est demeuré en vigueur pendant cinq ans. Suite à la rupture de la relation d'affaires, la Demanderesse prétend que le Défendeur s'est accordé des frais de gestion de 15 % à son insu. Elle en réclame le remboursement. Or, la Demanderesse a en sa possession depuis plusieurs années l'information financière pertinente à partir de laquelle on peut percevoir les frais de gestion en question. Le Défendeur allègue donc prescription.

L'Honorable juge Martin Bédard accepte cet argument et rejette la prétention de la Demanderesse que le délai de prescription n'a commencé à courir qu'à partir du moment où elle a pris connaissance des frais de gestion:
[68] Le Tribunal ne peut souscrire à la prétention de la demanderesse à l'effet que le délai de prescription ne doit courir qu'à compter de la réunion de l'automne 2007, alors que Maltais a appris la surcharge de 15 % pour frais d'administration.
[69] L'article 2880 C.c.Q. prévoit que le jour où le droit d'action a pris naissance fixe le point de départ de la prescription extinctive.
[70] L'auteur Pierre Martineau nous enseigne que le point de départ de la prescription est le premier moment où le titulaire du droit aurait pu agir, le premier instant où il aurait pu prendre son action et faire valoir son droit.
[71] De leur côté, les auteurs Jean-Louis Baudouin et Pierre Deslauriers nous enseignent que «on doit partir du jour où une victime raisonnablement prudente et avertie pouvait soupçonner le lien entre le préjudice et la faute».
[72] Maltais n'a jamais questionné les chiffres de Vallières.
[73] Il avait tout en main pour le faire.
[74] S'il n'avait pas les connaissances requises pour examiner les chiffres, rien ne l'empêchait de consulter un comptable en 2002, comme il l'a fait en 2007.
L'on constate donc qu'il existe un devoir de diligence et qu'il n'est pas suffisant de simplement prétendre que l'on avait pas compris la documentation ou l'information en notre possession.

Référence: [2010] ABD 155

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