par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
L'article 2639 C.c.Q., lequel indique que certaines matières ne peuvent être soumises à l'arbitrage, est loin d'être un modèle de clarté. Ainsi, il n'est pas toujours évident de déterminer ce qui est exclusif au domaine des tribunaux judiciaires. C'est pourquoi nous attirons aujourd'hui votre attention sur un jugement rendu en décembre 2009 par la Cour d'appel qui indique qu'un arbitre n'a pas le pouvoir de se prononcer sur une inscription en faux. Il s'agit de l'affaire H.A. Grétry inc. c. 9065-3627 Québec Inc. (2009 QCCA 2468).
La seule véritable question dans ce pourvoi était celle de savoir si l'arbitre conventionnel nommé dans cette affaire avait le pouvoir de se prononcer sur une inscription de faux. La Cour d'appel en vient à la conclusion que ce n'est pas le cas puisque l'inscription de faux est une question qui intéresse l'ordre public:
La seule véritable question dans ce pourvoi était celle de savoir si l'arbitre conventionnel nommé dans cette affaire avait le pouvoir de se prononcer sur une inscription de faux. La Cour d'appel en vient à la conclusion que ce n'est pas le cas puisque l'inscription de faux est une question qui intéresse l'ordre public:
[4] Même s’il est d’ordre public, l’article 2818 C.c.Q. pourrait recevoir application au cours d’un arbitrage régulièrement formé. L’arbitre, aux termes de cette disposition, serait donc tenu d’écarter d’office tout moyen de preuve tendant à contredire, dans un acte notarié dont la validité n’est pas contestée, l’énonciation d’un fait que le notaire instrumentant avait mission de constater. Il est même concevable que, selon les circonstances de l’espèce, une décision erronée d’un arbitre sur l’effet entre les parties de l’article 2818 C.c.Q.pourrait néanmoins faire l’objet d’une homologation valide dès lors qu’« [u]ne erreur d’interprétation d’une disposition législative à caractère impératif ne [permet pas en soi] l’annulation de la sentence pour violation de l’ordre public ».
[5] Cela dit, il en va différemment de l’annulation d’un acte notarié par la procédure d’inscription de faux car il s’agit dans ce cas d’une« question qui intéresse l’ordre public » au sens du premier alinéa de l’article 2639 C.c.Q. En tant que telle, cette procédure ne peut être soumise à l’arbitrage, et seul un tribunal de droit commun a compétence pour prononcer une telle nullité.
[6] Plusieurs raisons convergent pour qu’il en soit ainsi. Le régime des actes notariés fait l’objet d’une réglementation particulière établie par les articles 34 à 97 de la Loi sur le notariat. Les actes notariés sont souvent susceptibles d’affecter les droits des tiers. L’irrecevabilité d’un moyen de preuve tendant à contredire le contenu d’un tel acte est l’une des rares règles de recevabilité qui soit sanctionnées d’office pour des raisons d’ordre public. L’annulation d’un acte notarié enregistré, comme l’était ici le bail du 7 novembre 2003 intervenu entre l’appelante et l’intimée, déborde nécessairement le cadre du différend entre les parties liées par la convention d’arbitrage. C’est ce que démontre en l’occurrence la mise en cause par devant l’arbitre de l’officier de la publicité des droits et du notaire instrumentant. On peut d’ailleurs s’interroger sur le fondement juridique de telles mises en cause.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/vOrnSP
Référence neutre: [2011] ABD 345
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