par Karim Renno
Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.
En présence d'une clause compromissoire parfaite, les tribunaux québécois perdent juridiction pour entendre un litige donné. Il est donc logique de conclure qu'il n'est pas possible de demander à ces mêmes tribunaux de conclure que l'arbitre est forum non conveniens. C'est ce que confirme la Cour d'appel dans son jugement récent dans l'affaire Elliot c. Forecam Golf Ltd. (2011 QCCA 1029).
En l'instance, la Cour d'appel était saisie d'un pourvoi contre deux jugements rendus les 3 et 9 septembre 2010 par la Cour supérieure du district de Hull (l'honorable Martin Bédard), qui avait accueilli deux requêtes en exception déclinatoire présentées par l'Intimée et déclaré que les litiges mus entre les parties devaient être soumis à l'arbitrage.
La trame factuelle sous-jacente se résume comme suit selon la Cour d'appel:
En l'instance, la Cour d'appel était saisie d'un pourvoi contre deux jugements rendus les 3 et 9 septembre 2010 par la Cour supérieure du district de Hull (l'honorable Martin Bédard), qui avait accueilli deux requêtes en exception déclinatoire présentées par l'Intimée et déclaré que les litiges mus entre les parties devaient être soumis à l'arbitrage.
La trame factuelle sous-jacente se résume comme suit selon la Cour d'appel:
[2] Le 27 avril 2005, les appelants concluent avec l'intimée un bail de 5 ans pour la location d'un terrain de golf. Le bail contient une option d'achat. Le 30 décembre 2009, l'intimée transmet aux appelants une lettre annonçant son intention de se prévaloir de l'option d'achat. Les appelants refusent d'y donner suite parce que l'intimée serait en défaut selon les termes du bail. Le 26 février 2010, l'intimée demande aux appelants de nommer un arbitre pour régler ce litige conformément à la clause 17.11 du bail.
[3] Le 17 mars 2010, la mise en cause intente une action en passation de titre contre les appelants et l'intimée. Le 20 mars 2010, l'intimée dépose une action en passation de titre et en injonction contre les appelants (les conclusions injonctives visent à contraindre ces derniers à se soumettre à l'arbitrage). Le 19 avril 2010, les appelants intentent une action en annulation de bail contre l'intimée.
Après avoir mis de côté les arguments des Appelants sur la validité de la clause d'arbitrage, qu'ils prétendaient imparfaite, les Honorables juges Thibault, Rochette et Kasirer se penchent sur l'argument des Appelants voulant que le juge aurait dû appliquer la doctrine du forum non conveniens pour éviter que l'arbitrage se tienne en Ontario plutôt qu'au Québec où les faits du litige se sont déroulés. La Cour d'appel ne retient pas non plus ce moyen, indiquant qu'une fois faite la constatation qu'il est en présence d'une clause compromissoire parfaite le juge de première instance n'a plus de discrétion:
[16] Les appelants prétendent que le juge aurait dû appliquer la doctrine du forum non conveniens pour éviter que l'arbitrage se tienne en Ontario plutôt qu'au Québec où les faits du litige se sont déroulés.
[17] Cette doctrine ne permet pas aux tribunaux québécois de s'attribuer une compétence qu'ils n'ont pas, en raison d'une clause compromissoire parfaite. En somme, les appelants demandent à la Cour de faire obstacle à l'application de l'article 940.1 C.p.c. Or, en présence d'une clause compromissoire parfaite et tant que la cause n'est pas inscrite, le juge n'a aucune discrétion pour refuser le renvoi à l'arbitrage :149. Au sujet de la question principale de savoir si les tribunaux inférieurs ont commis une erreur en refusant de renvoyer les parties à l'arbitrage, les intimés ne contestent pas que, si la convention d'arbitrage est valide et s'applique au litige, les tribunaux ne possèdent aucun pouvoir discrétionnaire et ne doivent pas refuser de renvoyer les parties à l'arbitrage. Sur ce point, l'art. 940. C.p.c semble clair : si les parties ont conclu une convention d'arbitrage sur la question en litige, le tribunal renvoie les parties à l'arbitrage, à la demande de l'une d'elles, à moins que la cause n'ait été inscrite ou que le tribunal ne constate la nullité de la convention. Il est bien établi qu'en employant le verbe « renvoie » au présent de l'indicatif, le législateur a signalé que le tribunal n'a aucun pouvoir discrétionnaire de refuser de renvoyer l'affaire à l'arbitrage, à la demande de l'une des parties, lorsque les conditions requises sont remplies. Une simple lecture de l'article 940.1 C.p.c. démontre que trois conditions doivent être remplies; (i) les parties doivent avoir conclu une convention d'arbitrage sur la question en litige, (ii) la cause ne doit pas être inscrite, et (iii) le tribunal ne doit pas constater la nullité de la convention. Dans le cas de la dernière condition, il nous semble évident que la mention de la nullité de la convention vise également le cas où la convention d'arbitrage, sans être nulle, ne peut être opposée au demandeur.[18] En l'espèce, les parties ont déterminé à l'avance la loi qui allait régir les procédures d'arbitrage, soit la Loi sur l'arbitrage commercial. Conformément à l'article 3133 C.c.Q., que l'arbitrage ait lieu au Québec ou en Ontario, ce seront ces règles qui prévaudront.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/lTUDJb
Référence neutre: [2011] ABD 191
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