lundi 24 janvier 2011

Le délai à soulever un moyen d'irrecevabilité peut constituer une fin de non-recevoir

Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

Même si la jurisprudence nous enseigne qu'une requête en irrecevabilité peut-être présentée en tout état de cause, une partie est toujours bien avisée de présenter une telle requête dès la découverte de la cause d'irrecevabilité. En effet, la décision récente de la Cour supérieure dans 2963-0456 Québec Inc. c. Performance Guarantees (Québec inc.) (2011 QCCS 88) illustre bien les conséquences qui peuvent découler de l'inaction prolongée d'une partie.


Les procédures dans cette affaire sont instituées en 1993 et l'audition au mérite de la cause est finalement prévue pour le mois de janvier 2011 (pour une durée de 25 jours). Au matin de la première journée d'audition, la Défenderesse présente un moyen d'irrecevabilité relatif à l'absence de capacité corporative de la Demanderesse de poursuivre les procédures.

L'Honorable juge Richard Nadeau considère la situation inacceptable. Selon lui, ce moyen aurait pu, et aurait du, être soulevé beaucoup plus tôt:
[30] Tel que vu plus haut, jamais les défendeurs n'ont-ils soulevé, autrement que par des références plutôt vagues à l'absence de lien de droit ou l'absence de droit de poursuivre de la demanderesse jusqu'à ce qu'on a appelé la "découverte" d'un problème à cet égard en décembre 2010, alors qu'on préparait le procès.
[31] Me Prévost a d'ailleurs indiqué au Tribunal que c'était à l'examen de documents reçus de Me Casey, un de ses témoins, en novembre 2010 (la pièce D-30) qu'on aurait réalisé que la Convention de constitution de la société en commandite "la Convention", document # 20, prévoyait la dissolution de la Société soit en décembre 1999 ou avant, nous le verrons.
[32] Or, cette affirmation, sans doute faite de bonne foi, n'est pas véridique!
[33] En effet, parmi les pièces déposées ou à déposer par les défendeurs soit en 2003 ou en 2007, se trouvait le même document de clôture (anciennement D-217), comportant les mêmes éléments que ceux compris dans la nouvelle pièce D-30 et donc, toutes les mêmes informations que celles "découvertes" en décembre 2010!
[34] Le soussigné estime en conséquence que ce problème de dissolution était connu ou aurait dû être connu dès 2003 et aurait du être soulevé dès lors, soit par requête en Cour de pratique ou autrement, ce qui n'a pas été fait.
Citant la décision de la Cour d'appel dans Protestant School Board, le juge Nadeau en vient à la conclusion que l'inaction de la Défenderesse constitue une fin de non-recevoir dans les circonstances:
[35] Ainsi, et au nom de la règle d'équité dans les procédures autant que celle de la transparence des moyens qu'une partie entend soulever dans un dossier, le Tribunal estime que l'absence de l'avoir fait faire en temps approprié (en 2003 ou en 2007) ou, pire encore, le défaut de l'avoir annoncé avant que la bombe ne soit lancée sur le plancher le 10 janvier constitue une fin de non-recevoir pour la défense de soulever ce moyen, quels que soient les motifs de fraude ou autre qu'elle a allégués et qui demeurent à prouver.
[...]
[37] À ce titre donc, la requête des défenderesses devrait être rejetée.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/gqw6GU

Référence neutre: [2011] ABD 27

Autre décision citée dans le présent billet:

1. Protestant School Board of Greater Montreal c. Williams, J.E. 2002-1801 (C.A.).

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