jeudi 5 janvier 2017

La partie qui poursuit en responsabilité civile suite à chute ne peut se limiter à prouver que la propriété de la partie défenderesse était glacée

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Je suis certain que je n'ai pas à vous convaincre que les hivers québécois sont parfois durs et que les surfaces glacées font partie de notre réalité. C'est ce qui a amené les tribunaux québécois à souligner que la personne qui intente un recours en responsabilité civile suite à une chute ne rencontre pas son fardeau en prouvant simplement la présence de glace. L'Honorable juge Daniel Beaulieu rappelle ce principe dans l'affaire Melanson c. La fabrique de la paroisse de Saint-Germain (2017 QCCS 15).



Dans cette affaire, la Demanderesse intente un recours en dommages contre la Défenderesse suite à la chute survenue sur la propriété de cette dernière en février 2011. Elle allègue avoir chuté sur une plaque de glace en cette occasion et avoir subi des blessures.

Au procès, la Demanderesse se contente de prouver la présence de la glace sur le terrain de la Défenderesse et les circonstances de sa chute. Elle plaide que cette preuve est suffisante et qu'il est maintenant à la Défenderesse de prouver son entretien adéquat des lieux.

Le juge Beaulieu est en désaccord avec cette position et souligne que la Demanderesse a le fardeau de prouver une faute, ce qui implique plus que la simple présence de glace:
[28]        Ici, madame Melanson poursuit directement le propriétaire des lieux. Sa démarche est appropriée. Elle soutient toutefois que parce qu’elle a prouvé la présence de glace dans les allées de circulation au moment de l’accident, elle a rempli son fardeau de preuve. Elle limite donc cette preuve, puisque selon elle, il appartient maintenant aux défendeurs de démontrer, de manière prépondérante, le bon entretien des lieux. 
[29]        Dès l’audition, le Tribunal exprime son désaccord face à cette approche. La Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Castro c. 4258649 Canada inc., identifie d’ailleurs très bien le fardeau de preuve applicable en l’espèce : 
« [10] (…) Le renversement de fardeau dont prétend bénéficier l’appelant n’existe pas et aucune présomption légale ne découle de la seule présence de glace sur un terrain de stationnement. Il a été établi depuis longtemps que la responsabilité du propriétaire en cette matière ne peut résulter que d’une faute commise par lui ou ses préposés. Il appartient au demandeur de faire la preuve d’un lien de causalité entre la faute et l’accident dont il est victime. Cette preuve, comme le rappelle la jurisprudence, n’est pas facile à faire dans un contexte comme celui de l’hiver québécois.» 
[30]        Un peu plus loin, procédant à déterminer s’il y a lieu ou non faute dans l’entretien des lieux, la Cour ajoute : 
« [11]  (…) la juge a conclu qu’il y avait de la glace à l’endroit où l’appelant a chuté, elle n’a pas conclu à la présence de glace dans tout le stationnement, ce qui aurait pu être un indice de mauvais entretien, vu la température de l’époque, telle que révélée par les rapports météo. »
Référence : [2017] ABD 8

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