mercredi 28 juillet 2010

Diffamation: une approche contextuelle est requise

par Karim Renno
Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.

Quel est le standard nécessaire pour prouver la diffamation? Telle est la question posée à l'Honorable juge Lina Bond dans l'affaire Pierre Vandal et Tapis Contour Inc. c. Morin (2010 QCCQ 6369).


Dans celle-ci, les demandeurs alléguaient que le défendeur avait proféré des propos diffamatoires à leur égard, entre autre en traitant M. Vandal de "voleur" et de "crosseur". La juge Bond en vient à la conclusion qu'il n'y a pas diffamation en l'instance, même si les termes "crosseur" et "voleur" sont de nature diffamatoire. D'abord, parce que la preuve prépondérante ne permet pas de conclure que ces propos ont été effectivement tenus par le défendeur, mais surtout parce que les propos n'auraient pas été tenus publiquement. Selon la Cour, il s'agit là d'une condition essentielle pour conclure à la diffamation.
[37] Soulignons que les propos seront considérés diffamatoires seulement s’ils deviennent publics.
Finalement, la juge Bond souligne que la nature diffamatoire ou non de propos s'apprécie en fonction du contexte bien précis de chaque situation:
[34] Dans leur ouvrage, voici ce que les auteurs Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers mentionnent sur la faute en matière de diffamation.
[...] La première est celle où le défendeur, sciemment, de mauvaise foi, avec intention de nuire, s’attaque à la réputation de la victime et cherche à la ridiculiser, à l’humilier, à l’exposer à la haine ou au mépris du public ou d’un groupe. La seconde résulte d’un comportement dont la volonté de nuire est absente, mais où le défendeur a, malgré tout, porté atteinte à la réputation de la victime par sa témérité, sa négligence, son impertinence ou son incurie. […]
[35] Dans l’arrêt Prud’homme, la Cour suprême s’exprime ainsi :
[…] Il faut, en d’autres termes, se demander si un citoyen ordinaire estimerait que les propos tenus, pris dans leur ensemble, ont déconsidéré la réputation d‘un tiers. À cet égard, il convient de préciser que des paroles peuvent être diffamatoires par l’idée qu’elles expriment explicitement ou encore par les insinuations qui s’en dégagent. 
[36] Toutefois, comme l’écrit l’avocat Marc Simard:
Dans une action en diffamation, il faut procéder à une analyse contextuelle des faits et des circonstances pour déterminer si une faute a été commise. Les propos incriminés doivent être considérés dans leur contexte et dans leur ensemble. Une interprétation isolée et subjective des propos tenus doit être rejetée. […]
 
Référence : [2010] ABD 46

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